EUROPOL: création de l'Office européen de police

2006/0310(CNS)

OBJECTIF : transformer EUROPOL en agence communautaire et remplacer l’actuelle convention par une décision du Conseil.

ACTE LÉGISLATIF : Décision 2009/371/JAI du Conseil portant création de l’Office européen de police (EUROPOL).

CONTEXTE : l'Office européen de police (EUROPOL) a été créé en 1995 par une convention conclue entre les États membres. Il s’agissait de la 1ère organisation établie en application du Traité de Maastricht. À cette époque, la coopération européenne dans le domaine de la «Justice et Affaires intérieures» était strictement limitée. Mais depuis lors, un acquis considérable a été adopté, notamment avec la création d’importants organismes, tels qu'EUROJUST et le CEPOL créés par des décisions du Conseil.

Depuis lors, trois protocoles ont modifié la Convention (en 2000, 2002 et 2003) et sont entrés en vigueur le 29 mars 2007 pour les deux premiers et le 18 avril 2007 pour le troisième. Le premier protocole étend le mandat d'EUROPOL au blanchiment d'argent, là où les deux autres renforcent les pouvoirs de l'Office dans son activité de soutien aux États membres en lui permettant notamment de: i) coordonner des équipes d'enquête communes, ii) demander l'ouverture d'enquêtes, iii) permettre la participation d'États tiers (avec lesquels EUROPOL a conclu des accords opérationnels) aux groupes d'analyse, etc.

Toutefois devant la nécessité de bénéficier d’un instrument juridique plus facile à adapter qu’une convention, le Conseil a décidé de modifier la base juridique de l’Office de manière à transformer cet organisme en agence communautaire et de prévoir son financement par le budget communautaire.

CONTENU : l’objectif de la décision est de remplacer l’actuelle convention de 1995 par une décision du Conseil. Cette modification fondamentale entraîne la transformation de l'Office en une agence européenne, ce qui lui assure:

  • un financement par le budget communautaire;
  • le renforcement du rôle du Parlement européen, notamment par le biais du contrôle démocratique et budgétaire sur EUROPOL;
  • l’octroi du statut du personnel des Communauté à ses agents;
  • son apparentement à d'autres organes et agences comme EUROJUST ou le CEPOL.

La décision intègre également tous les protocoles successifs modifiant la convention de base.

Nouvelles compétences et fonctions d'EUROPOL : la décision étend le mandat de l'organisation à toute forme grave de criminalité transnationale, comme défini dans son annexe I. La nouvelle liste des types d'infraction considérés comme forme grave de crimes reprend les formes de criminalité organisée et le terrorisme, mais ajoute aussi, entre autres, l'homicide volontaire, le vol organisé ou la criminalité liée aux matières nucléaires et radioactives.

Fonctions : en ce qui concerne ses fonctions, EUROPOL pourra fournir une assistance (pas opérationnelle, mais plutôt d'analyse) aux États membres dans l'organisation d'événements internationaux qui nécessitent des mesures de maintien de l'ordre. Les informations utilisées dans le cadre de ses activités traditionnelles pourront dorénavant être fournies également par des organismes privés. Ainsi, EUROPOL pourra :

  1. collecter, stocker, traiter, analyser et échanger des informations et des renseignements;
  2. communiquer aux autorités compétentes des États membres, les faits qui les concernent et les informer immédiatement des liens constatés entre des infractions;
  3. faciliter les enquêtes dans les États membres, plus particulièrement en transmettant aux unités nationales toutes les informations pertinentes à cet égard;
  4. demander aux autorités compétentes des États membres concernés d’ouvrir, de mener ou de coordonner des enquêtes et suggérer la constitution d’équipes communes d’enquête dans certaines affaires;
  5. fournir aux États membres des renseignements et une aide à l’analyse lorsque ont lieu des manifestations internationales importantes;
  6. établir des évaluations de la menace, des analyses stratégiques et des comptes rendus généraux concernant son objectif, y compris des évaluations de la menace posée par la criminalité organisée.

EUROPOL pourra également remplir des missions d’expertise, de renseignement stratégique ainsi que  de formation.

Participation aux équipes communes d’enquête : le personnel d’EUROPOL pourra participer comme précédemment à des  équipes communes d’enquête, y compris aux équipes constituées conformément à la décision-cadre 2002/465/JAI du Conseil relative aux équipes communes d’enquête ou d’autres textes pertinents, dans la mesure où ces équipes enquêtent sur des infractions relevant de sa compétence. Les modalités administratives de la participation du personnel d’EUROPOL à une équipe commune d’enquête seront fixées dans un arrangement conclu entre le directeur de l’agence et les autorités compétentes des États membres participants. Au cours des opérations communes d’enquête, le personnel d’EUROPOL sera soumis au droit national de l’État membre où l’opération a lieu.

D’autres dispositions sont prévues comme notamment des dispositions portant sur :

  • les procédures à suivre en cas de demandes d’ouverture d’enquête pénale par EUROPOL ;
  • les tâches et missions des unités nationales d’EUROPOL et des officiers de liaison (bureaux nationaux de liaison d’EUROPOL). En particulier, la décision précise que les unités de liaison devront être les seules organes de liaison entre EUROPOL et les États membres. Elles recevront en même temps qu’EUROPOL, toutes les informations pertinentes et devront fournir à EUROPOL et sur leur propre initiative, toutes les informations nécessaires dans le cadre des enquêtes menées par l’Office.

Traitement de l'information: nouveaux outils et dispositions communes : des nouveaux systèmes de traitement des données à caractère personnel pourront s'ajouter aux principaux déjà mis en place et utilisés par l'Office européen de police (notamment le système d'information et les fichiers de travail aux fins d'analyse). Pour ces nouveaux outils, le Conseil, après consultation du Parlement européen, fixera les conditions concernant l'accès aux données, leur utilisation et leur conservation.

EUROPOL devra assurer l'interopérabilité de ses systèmes de traitement de données avec ceux des États membres, et en particulier ceux utilisés par les organismes de l'Union avec lesquels il est susceptible d'établir des relations.

En ce qui concerne l'accès aux données contenues dans le système d'information EUROPOL déjà en place – le SIE – les unités nationales pourront obtenir le plein accès à l'ensemble des informations disponibles dans le système.

Pour ce qui est des fichiers de travail aux fins d'analyse (comprenant des données relatives aux infractions relevant de sa compétence), EUROPOL devra les supprimer au bout d'une période de 3 ans à moins que, à la fin de cette période, il ne considère le maintien d'un fichier donné comme strictement nécessaire. Dans ce cas, le fichier pourra être conservé pour de nouvelles périodes de 3 ans. Tout comme dans la convention EUROPOL, ces fichiers sont créés aux fins de l'analyse, définie comme l'assemblage, le traitement ou l'utilisation de données dans le but d'appuyer l'enquête criminelle.

Délai de conservation des données : les données contenues dans les fichiers ne doivent être conservées par EUROPOL que le temps nécessaire pour lui permettre de remplir ses fonctions. La nécessité de continuer à les conserver doit être examinée au plus tard 3 ans après leur introduction. Une nouvelle disposition prévoit que cette vérification soit menée par la même unité qui les a introduites, dans le cas des données stockées dans le SIE ou par EUROPOL, pour d'autres fichiers des services de l'Office.

Les mécanismes de contrôle destinés à vérifier le caractère licite des demandes de données figurant dans les fichiers automatisés qui servent au traitement des données personnelles seront aussi renforcés, en augmentant la durée de conservation des données d'audit de 6 à 18 mois.

Protection et sécurité des données : pour tout ce qui concerne la collecte, le traitement et l'utilisation des données à caractère personnel, la décision tiendra compte de la décision-cadre 2008/977/JAI du Conseil relative à la protection des données à caractère personnel traitées dans le cadre de la coopération policière et judiciaire en matière pénale.

Un nouveau statut de délégué à la protection des données est créé, avec des fonctions indépendantes et une liberté d'accès à la totalité des informations détenues par EUROPOL et à ses locaux. Le délégué aura pour tâche principale de veiller au respect des dispositions concernant la protection de toutes les données personnelles traitées par EUROPOL.

Relations avec d’autres organisations communautaires ou des pays tiers : dans le cadre d’arrangements à conclure avec des organisations communautaires ou avec des organismes compétents de pays tiers, EUROPOL peut, dans la mesure où cela est utile à l’exécution de ses fonctions, établir des relations de coopération avec EUROJUST, l’OLAF, l’Agence FRONTEX, le CEPOL, la BCE et l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT). EUROPOL peut également coopérer avec des États tiers ou des organisations internationales comme Interpol. Si l’Office coopère avec des tiers, des dispositions spécifiques devront être appliquées en matière de transmission des données. En principe, si les données ont été transmises à EUROPOL par un État membre, l’Office ne peut les transmettre aux entités tierces qu’avec l’accord de l’État concerné. Si les données n’ont pas été transmises par un État membre, EUROPOL devra s’assurer que leur transmission n’est pas de nature à menacer la sécurité ou l’ordre public d’un État membre. Enfin, EUROPOL pourra traiter des données à caractère personnel émanant de parties privées à condition qu’un certain nombre de conditions soient remplies décrites à la décision.

Administration, organes d'EUROPOL et personnel : l'Office européen de police sera placé sous l'autorité d'un directeur nommé par le Conseil statuant à la majorité qualifiée, pour une période de 4 ans renouvelable une fois. Dans ses fonctions, notamment l'exécution des tâches d'EUROPOL, l'administration courante, l'exécution du budget, la représentation légale d'EUROPOL, etc., il sera assisté par trois directeurs adjoints qui exercent leurs mandats pour la même période. La structure administrative d’EUROPOL, apparentée à d’autres agences communautaires du même type, sera composée, outre de son directeur, d’un conseil d'administration (un représentant par État membre) et de membres de la Commission.

Avec la transformation de l'Office en agence européenne, le personnel dépendra du statut des agents des Communautés européennes.

Dispositions budgétaires : à compter du 1er janvier 2010, cette organisation ayant le statut d’entité de l’Union, sera financée par le budget général de l’Union européenne et son budget sera contrôlé par le Parlement européen, conformément à la procédure de décharge.

ENTRÉE EN VIGUEUR : la décision entre en vigueur le 4 juin 2009.

APPLICATION : en principe la décision est applicable à compter du 1er janvier 2010. La Convention EUROPOL et protocoles modificatifs sont abrogés à compter de cette date.