Entreprises d'investissement et établissements de crédit: adéquation des fonds propres. Refonte

2004/0159(COD)

La Commission a présenté un rapport concernant les effets des directives 2006/48/CE et 2006/49/CE sur le cycle économique.

Les exigences minimales de fonds propres (EMFP) applicables aux banques en vertu de la directive de l'UE sur l'adéquation des fonds propres (DAFP) (qui comprend les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE), sont sensibles aux risques : plus le risque est élevé, plus les banques doivent détenir de fonds propres pour couvrir ce risque et leurs pertes potentielles. En période de ralentissement économique, les risques de crédit et de marché augmentant, les exigences minimales de fonds propres des banques augmentent parallèlement pour y faire face. Les banques peuvent alors avoir besoin de lever des fonds supplémentaires pour faire face à la hausse de ces exigences.

L'éventualité d'un rôle de la DAFP dans la procyclicité constatée au sein du système financier à l'époque du cadre de Bâle I explique l'inclusion dans la DAFP de l'article 156, qui impose à la Commission européenne de contrôler régulièrement si la DAFP a des effets importants sur le cycle économique. Le présent rapport a été établi à cet effet, en coopération étroite avec la BCE et le Comité européen des contrôleurs bancaires (CECB).

Le rapport souligne qu’il est possible que la règlementation sur les fonds propres des banques amplifie la cyclicité inhérente au comportement des banques en matière de prêts. En raison de leur sensibilité aux risques, on peut considérer que les exigences de fonds propres établies par le cadre de Bâle II, tel que transposé dans l'UE par la DAFP, sont relevées en période de ralentissement et allégées en période d'expansion. Comme il peut se révéler coûteux pour les banques de lever des fonds supplémentaires en période de ralentissement économique, cet état de fait pourrait les inciter à préférer limiter leurs prêts. En revanche, lorsque les exigences de fonds propres s'allègent en période d'expansion économique, les banques disposent peut-être d'une marge de manœuvre plus grande pour étoffer leur offre de prêts et / ou prêter de manière plus risquée, par rapport à la moyenne historique observée sur l'ensemble du cycle économique.

Étant donné que la procyclicité découle de plusieurs facteurs, il est difficile de définir précisément les effets des exigences minimales de fonds propres. Pour apprécier correctement ces effets, il serait nécessaire de disposer de données détaillées en quantité suffisante, ce qui n'est pas encore le cas, car la DAFP n'a été mise en œuvre que récemment.

Pour que la DAFP ait des effets procycliques, il faut que certaines conditions soient remplies. Afin de déterminer dans quelle mesure elles ont été vérifiées de manière empirique, le rapport suit la structure suggérée par la BCE en tentant d'apporter une réponse aux questions suivantes:

  • La plus grande sensibilité au risque inhérente au cadre de la DAFP accentue-t-elle la cyclicité des exigences minimales de fonds propres et, si tel est le cas, dans quelle mesure?
  • Des exigences cycliques de fonds propres ont-elles une incidence sur le niveau de fonds propres des banques et influencent-elles l'offre de prêts de celles-ci?
  • Le caractère cyclique de l'offre de prêts bancaires a-t-il un effet amplificateur sur le cycle économique?

Le rapport considère que globalement, il reste difficile d'évaluer dans quelle mesure l'introduction de la DAFP a renforcé le caractère procyclique du crédit bancaire. Bien que les éléments présentés dans le rapport suggèrent des liens possibles entre la DAFP et le comportement des banques en matière de prêts, on ne peut faire l'économie d'une analyse conduite sur une plus longue période pour pouvoir tirer des conclusions plus solides. Il convient, en outre, de souligner que, comme la mise en œuvre du cadre de Bâle II a coïncidé avec le déclenchement de la crise financière, il est particulièrement difficile de démêler les effets de ces deux événements.

En ce qui concerne l’incidence de la disponibilité du crédit sur le cycle économique, le rapport note que malgré les signes observés ces derniers mois d'une substitution croissante entre les financements par le marché et les financements bancaires, il faut d'autant moins sous-estimer le rôle prédominant joué par les banques dans l'apport de fonds à des fins de dépenses et d'investissement que l'obtention des fonds nécessaires à partir d'autres sources se révèle difficile pour certaines entreprises, notamment les plus petites. De plus, l'expérience récente a montré que les chocs au niveau de l'offre de prêts pouvaient affecter l'activité économique dans la zone euro, dont le système financier repose essentiellement sur les banques.

S’agissant des mesures visant à limiter la procyclicité, le rapport indique que la crise récente a montré que les acteurs du marché exigent une hausse du niveau des fonds propres lorsqu’ils considèrent qu’un établissement aura des difficultés à absorber les pertes. Intégrer au cadre réglementaire des exigences de fonds propres des mesures contracycliques plus efficaces pourrait contribuer à rétablir la confiance dans les bilans des banques, et à réduire ainsi la probabilité pour les banques de devoir augmenter leurs fonds propres réglementaires ou abaisser fortement le levier de leurs portefeuilles de crédit, pour répondre aux attentes des acteurs du marché. La Commission partage l'avis des institutions internationales, telles que le Conseil de stabilité financière et le Comité de Bâle, qui préconisent des mesures complémentaires pour éviter une procyclicité excessive.

La Commission envisage d'introduire des tampons de fonds propres et / ou des provisions sur la durée du cycle. Le provisionnement dynamique correspond au provisionnement pour les pertes sur prêts «anticipées» sur les expositions et les tampons concernent les «pertes non anticipées». Afin de lutter contre la procyclicité au niveau macroprudentiel, la Commission est favorable à la mise en place d'un tampon de fonds propres variable dans le temps. Dans la ligne du Comité de Bâle, la Commission envisage également d'introduire un ratio de levier. Il serait  souhaitable d'harmoniser le ratio de levier au niveau international avant de le mettre en application, de l'ajuster entièrement au regard de toutes les différences qui subsistent en matière comptable. Ce ratio serait calibré de façon à compléter de manière crédible les exigences fondées sur le risque, compte tenu des modifications futures du cadre de Bâle II.

Pour sa part, la Commission a pris un certain nombre de mesures. Elle a notamment proposé : i) de compléter les exigences de la DAFP par une obligation expresse faite aux établissements de crédit et aux entreprises d'investissement de mettre en place et de maintenir, pour les catégories du personnel dont les activités influencent notablement le profil de risque, des politiques et des pratiques de rémunération compatibles avec une gestion efficace du risque ; ii) de modifier la DAFP afin de relever les exigences réglementaires de fonds propres pour les activités relevant du portefeuille de négociation et pour les retitrisations détenues dans le portefeuille bancaire ; d'instituer le Comité européen du risque systémique (CERS) pour surveiller la stabilité de l'ensemble du système financier.

En conclusion, la Commission constate que nombre d'institutions et comités internationaux ont souligné l'importance d'introduire des mesures contracycliques dans le cadre prudentiel, afin d'éviter une procyclicité excessive au sein du système financier. En parallèle aux travaux en cours au sein du Comité de Bâle, la Commission examinera, en particulier, les possibilités de limiter de la manière la plus efficace le risque systémique et la procyclicité. La Commission estime que ces mesures devraient permettre d'éviter les prises de risque excessives en période de croissance économique, mais qu'elles devraient également être conçues de manière à pouvoir être atténuées en période de ralentissement économique, afin d'accroître la résistance du secteur bancaire et de favoriser l'apport de prêts à l'économie.

La Commission prendra également en compte les travaux en cours de l'organisme international qui élabore les normes comptables (l'IASB) et des autorités de surveillance prudentielle (le Comité de Bâle, notamment) dans le cadre de la préparation d'une proposition législative.