La commission des affaires étrangères a adopté le rapport d’initiative de Bastiaan BELDER (EFD, NL) sur l'approche de l'Union européenne vis-à-vis de l'Iran
Les députés rappellent que l'Iran est confronté à une multitude de défis qui vont du malaise de la population dû, en grande partie, au régime iranien lui-même et à des difficultés économiques et sociales, en passant par un contexte d'insécurité régionale croissant et la violation permanente des droits de l’homme dans le pays.
Face à ces défis, les députés soulignent qu’une approche européenne doit être définie vis-à-vis de l’Iran, dont les contours peuvent se résumer comme suit :
Situation intérieure : constatant la situation politique intérieure de l’Iran et la volonté du peuple iranien d’aspirer à plus de démocratie (surtout dans les couches jeunes de la population), les députés soulignent que ce changement démocratique ne peut être imposé de l'extérieur ou par des moyens militaires. Il doit au contraire se concrétiser par un processus démocratique pacifique. Ils rappellent que le président Ahmadinejad a beau avoir été élu en 2005 sur un programme de justice sociale et de populisme économique, les problèmes de l'Iran continuent de s'aggraver malgré la hausse des prix du pétrole. Ils déplorent notamment la radicalisation du pouvoir en place, et la tendance d’Ahmadinejad à prôner une posture fondamentalement anti-occidentale et anti-israélienne.
Les députés constatent toutefois qu’une force d’opposition se fait jour en Iran et que ce mouvement réformiste couvre tout un spectre de tendances intellectuelles et de programmes politiques avec pour objectif de renverser totalement le régime en place. Renouvelant leur solidarité envers les millions d'Iraniens qui sont descendus dans la rue au lendemain des élections présidentielles de juin 2009, les députés condamnent la répression sanglante des opposants et mettent en garde contre toute action des gardiens de la révolution islamique (CGRI).
Droits de l'homme : outre la situation intérieure de l’Iran, ce sont les violations constantes des droits de l’homme que les députés mettent clairement en avant.
Ainsi, les députés demandent-ils :
Les députés s’inquiètent également de toutes les répressions dont ont été victimes les manifestants du 13 juin 2009 et les exécutions des opposants politiques. Ils condamnent encore le musèlement de l'opposition politique et appellent les institutions européennes à présenter aux autorités iraniennes une liste détaillée de tous les incidents/actes violents connus perpétrés à l'encontre de civils iraniens au lendemain des élections. Ils insistent en particulier pour le lancement d’une enquête indépendante internationale sur le sujet. Les députés réitèrent également leur appel à la libération de toutes les personnes détenues pour avoir exercé pacifiquement leurs droits à la liberté d'expression, d'association et de réunion.
Pour sa part, la haute représentante/vice-présidente de l’UE est appelée à faire de la situation des droits de l'homme dans le pays une priorité essentielle dans le cadre des négociations avec l’Iran. Tous les instruments dont dispose l’UE pour la protection et la défense des droits de l'homme en Iran doivent être mobilisés ainsi que d’autres instruments européens au besoin.
Les députés condamnent encore le régime iranien pour :
Ils appellent l'Iran à signer, ratifier et mettre en œuvre la convention des Nations unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et le renforcement des droits des femmes. Pour leur part, les institutions européennes sont appelées à renforcer leurs contacts avec les représentants d'un large éventail d'organisations de la vie politique et sociale iranienne.
Parallèlement, les députés demandent la fin de l'impunité en Iran par l'établissement d'une procédure de contrôle judiciaire indépendant au sein du pays ou par le renvoi à la Cour pénale internationale.
Le dossier nucléaire : nonobstant le droit qu'a l'Iran de développer l'énergie nucléaire à des fins pacifiques, les députés réaffirment que les risques de prolifération résultant du programme nucléaire iranien demeurent une source de grave préoccupation pour l'Union européenne et la communauté internationale. Les députés appellent dès lors les autorités iraniennes à respecter les obligations de l'Iran en vertu du TNP et condamnent fermement le refus continu de l'Iran de coopérer pleinement avec l'AIEA en s'opposant à ses inspecteurs. Soutenant pleinement la double approche du Conseil européen visant à trouver une solution négociée et pacifique à l'impasse nucléaire (notamment la position commune du 26 juillet 2010 introduisant de nouvelles mesures ciblées autonomes de large portée applicables à l'Iran), les députés déplorent les échecs continus pour sortir de ce blocage. Ils invitent la haute représentante à accorder la priorité au dossier nucléaire iranien et aux droits du peuple iranien, et demandent à l'Iran d'engager des négociations constructives en vue d'atteindre une solution globale et durable sur la question nucléaire. Les députés sont en effet convaincus que l'UE doit définir une stratégie plus large en ce qui concerne l'Iran, qui irait plus loin que la question nucléaire et qui se pencherait également sur la situation des droits de l'homme en Iran et sur son rôle régional. Dans l’attente, ils invitent la haute représentante et les États membres à évaluer tous les mécanismes d'application pour la mise en œuvre de la position commune de l'Union – notamment en matière de licences d'exportation, de contrôles douaniers et frontaliers et de transports aériens et maritimes – afin d'éviter que l'Iran n'échappe au régime de sanction. Ils réaffirment cependant que ces mesures ne devraient pas porter préjudice à la population et appellent le Conseil à adopter la même position que les États-Unis qui ont imposé des sanctions ciblées aux dirigeants iraniens considérés comme responsables ou complices de graves violations des droits de l'homme.
Plus globalement, les députés se réjouissent de l'appel au désarmement nucléaire lancé par le président Obama, et invitent la haute représentante à faire de cette question une de ses priorités, tant dans ses relations avec les États membres que dans ses contacts avec le Moyen-Orient et l'Asie.
Plusieurs autres mesures sont envisagées par les députés sur le dossier nucléaire :
Relations extérieures : les députés condamnent avec force les propos du président Ahmadinejad qui appellent à l’ «extermination» d’Israël (et notamment son déni de l'Holocauste). Ils invitent le Conseil et la Commission à surveiller de près la situation dans la région du Golfe et à faire tout leur possible pour y promouvoir la paix et la stabilité.
Parallèlement, les députés constatent le rapprochement de l’Iran avec la Turquie et soulignent les efforts de ce pays pour trouver une solution négociée à l'impasse nucléaire iranienne, même si l’approche de la Turquie ne répond que partiellement aux demandes de l'AEIA. Ils demandent dès lors un rapprochement de la position turque et européenne.
Les députés demandent également à la Russie de mettre fin à toute prolifération d'armes et exportation d'uranium à l'Iran afin de garantir l'efficacité des sanctions à l'encontre de l'Iran et l'exécution du TNP.
Ils font enfin remarquer l'intérêt partagé par l'Union européenne et l'Iran de garantir la paix et la stabilité en Afghanistan et saluent le rôle constructif joué par l'Iran dans la rénovation des infrastructures et la relance de l'économie de ce pays. Ils appellent ce pays à continuer de contribuer à la lutte effective contre la production d'opium et le trafic de drogue en Afghanistan.