Organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM): fonctions de dépositaire, politiques de rémunération et sanctions

2012/0168(COD)

OBJECTIF : accroître la confiance des investisseurs dans les organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM).

ACTE PROPOSÉ : Directive du Parlement européen et du Conseil.

CONTEXTE : depuis l’adoption de la directive sur les OPCVM en 1985, les règles relatives aux dépositaires contenues dans cette directive sont restées inchangées. Ces règles consistent en un certain nombre de principes génériques sur les obligations incombant aux dépositaires. La directive renvoie toutefois aux droits nationaux pour ce qui est des contours précis de ces obligations. Cela laisse une marge d’interprétation considérable à la fois sur l’étendue des obligations incombant au dépositaire et sur sa responsabilité en cas de négligence.

Différentes approches se sont donc développées au sein de l’Union européenne, et les investisseurs des OPCVM ne bénéficient pas tous du même niveau de protection selon les pays. Les conséquences que peuvent entraîner des divergences nationales dans la définition de la norme en matière de responsabilité ont éclaté au grand jour à la suite de la faillite de Lehman Brothers et de la fraude Madoff. L’affaire Madoff a été le révélateur des incertitudes générales grevant la réglementation des OPCVM, notamment en ce qui concerne la responsabilité du conservateur principal lorsque la conservation est déléguée à un sous-conservateur. Elle a aussi soulevé la question des conflits d’intérêts.

La Commission juge nécessaire de modifier la directive 2009/65/CE afin de tenir compte des évolutions du marché et de l'expérience acquise à ce jour par les acteurs des marchés et les autorités de surveillance, notamment pour remédier aux divergences entre les dispositions nationales observées au niveau des obligations incombant aux dépositaires et de leur responsabilité, des politiques de rémunération et des sanctions.

La proposition fait partie d’un paquet législatif, visant à reconstruire la confiance des consommateurs dans les marchés financiers. Ce paquet comprend deux volets :

ANALYSE D’IMPACT : l’analyse d’impact s’est concentrée sur cinq questions. Ses principales conclusions sont les suivantes :

  1. L’éligibilité aux fonctions de dépositaire : aussi bien les établissements de crédit que les entreprises d’investissement réglementées offrent des garanties adaptées à cet exercice, en termes de réglementation prudentielle, d’exigences de fonds propres et de surveillance effective. D’autres établissements (tels que les cabinets d’avocats et les études de notaires) ne sont pas réputés offrir de semblables garanties et devraient, pour ceux d’entre eux qui souhaiteraient exercer l’activité de dépositaire d’OPCVM, se convertir en entreprises d’investissement réglementées. Ainsi, l’option privilégiée n’aurait d’impact que sur une petite minorité de prestataires de services non agréés.
  2. Les critères de délégation de la conservation : la délégation de la conservation devrait être régie par des règles de diligence en matière de sélection et de désignation du sous-conservateur, ainsi que par des règles prévoyant un suivi continu des activités exercées par celui-ci.
  3. La responsabilité en cas de perte d’instruments financiers en conservation : une norme de «responsabilité stricte», imposant aux dépositaires de restituer les instruments perdus alors qu’ils en assuraient la conservation, indépendamment de la notion de faute ou de négligence, serait susceptible à la fois de garantir un haut niveau de protection des investisseurs et de permettre l’instauration d’une norme uniforme dans l’ensemble de l’UE.
  4. La rémunération des gestionnaires d’OPCVM : les sociétés de gestion des OPCVM auraient l’obligation de mettre en œuvre une politique de rémunération qui soit conforme à une saine gestion des risques du fonds et satisfasse à des principes minimums en matière de rémunération.
  5. Les sanctions applicables en cas d’infraction aux règles OPCVM : l’option choisie consiste à assurer une harmonisation minimum des régimes de sanctions. Ce régime de sanctions s’appliquerait à un ensemble d’infractions aux principales garanties de protection des investisseurs prévues dans la directive OPCVM.

BASE JURIDIQUE : article 53, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).

CONTENU : la proposition vise à modifier la directive 2009/65/CE sur les OPCVM pour ce qui est des fonctions de dépositaire, des politiques de rémunération et des sanctions. Les principaux éléments de la proposition sont les suivants :

Règles relatives aux obligations incombant aux dépositaires : en ce qui concerne les missions essentielles de garde et de supervision incombant au dépositaire, la proposition envisage de modifier comme suit la directive OPCVM :

  • nomination d’un seul dépositaire pour chaque fonds OPCVM en vue de garantir qu’un fonds ne peut avoir plusieurs dépositaires ; la nomination du dépositaire devrait être attestée par un contrat écrit ;
  • uniformisation de la liste des obligations de supervision incombant aux dépositaires des OPCVM établis sous forme contractuelle et des OPCVM constitués en société. Ces obligations sont de: i) s’assurer du respect des règles applicables, lors de la vente, de l’émission, du rachat, du remboursement et de l’annulation de parts de l’OPCVM; ii) s’assurer de la remise de toute contrepartie dans les délais d’usage; iii) s’assurer que les produits de l’OPCVM reçoivent une affectation conforme à ses documents constitutifs et au droit national applicable; iv) exécuter les instructions de la société de gestion ou de la société d’investissement ;
  • dispositions détaillées sur le suivi de la liquidité de façon à donner au dépositaire une vue d’ensemble de tous les actifs de l’OPCVM, liquidités comprises. La proposition garantit qu’aucun compte d’espèces en lien avec les opérations du fonds ne peut être ouvert à l’insu du dépositaire. L’objectif est de rendre impossibles les transferts d’espèces de nature frauduleuse ;
  • instauration d’une distinction entre : a) les obligations de conservation, pour les instruments financiers qui peuvent être détenus en conservation par le dépositaire et b) les obligations de vérification de la propriété pour les autres types d’actifs ;
  • introduction d’une série de dispositions classiques sur la conduite professionnelle et sur la prévention et la gestion des conflits d’intérêts.

Règles en matière de délégation :

  • définition des conditions dans lesquelles les obligations de garde du dépositaire peuvent être déléguées à un sous-conservateur (sur le modèle des conditions appliquées dans le cadre de la directive sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs).

Règles relatives à l’éligibilité aux fonctions de dépositaire d’OPCVM :

  • introduction d’une liste exhaustive des entités éligibles. La politique choisie est de n’autoriser que les établissements de crédit et les entreprises d’investissement à exercer l’activité de dépositaire d’OPCVM.

Règles en matière de responsabilité :

  • clarification de la responsabilité du dépositaire d’OPCVM en cas de perte d’un instrument financier détenu en conservation. En pareil cas, le dépositaire serait dans l’obligation de restituer à l’OPCVM un instrument financier de type identique ou d’un montant correspondant. Aucune exonération de responsabilité n’est prévue, sauf lorsque le dépositaire est en mesure de prouver que la perte résulte d’un «événement extérieur échappant à son contrôle raisonnable» ;
  • responsabilité du dépositaire même s’il a confié à un tiers tout ou partie des actifs dont il a la garde. En conséquence, le dépositaire serait tenu de restituer les instruments perdus alors qu’ils étaient en conservation, même si la perte s’est produite au niveau du sous-conservateur.

Recours :

  • harmonisation des droits des investisseurs des OPCVM constitués aussi bien en société que sous forme contractuelle: les investisseurs pourraient invoquer la responsabilité du dépositaire, soit directement, soit indirectement (via la société de gestion), selon la nature juridique du lien entre dépositaire, société de gestion et porteurs de parts.

Rémunération :

  • la proposition s’inspire de la politique actuelle en matière de rémunération des dirigeants, des preneurs de risques et autres personnes exerçant des fonctions de contrôle. Cette politique devrait s’appliquer aussi aux personnes qui gèrent les OPCVM, que ce soit dans le cadre d’une société d’investissement ou d’une société de gestion.

Accès aux enregistrements d’échanges téléphoniques et de données :

  • possibilité pour les autorités compétentes d’exiger les enregistrements d’échanges téléphoniques et de données détenus par un opérateur de télécommunications, un OPCVM, une société de gestion, une société d’investissement ou un dépositaire, lorsqu’il existe une présomption raisonnable de ce que ces enregistrements peuvent servir à établir la preuve d’une violation aux dispositions de la directive OPCVM.

Sanctions :

  • définition d’une approche commune pour les principales infractions à la directive OPCVM. La proposition dresse une liste des infractions en question, ainsi qu’une une liste des mesures et sanctions administratives que les autorités compétentes devraient être habilitées à prendre en ce cas.

INCIDENCE BUDGÉTAIRE : la proposition n’a pas d’incidence sur le budget de l’Union européenne.

ACTES DÉLÉGUÉS : la proposition contient des dispositions habilitant la Commission à adopter des actes délégués conformément à l’article 290 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.