Préparation du cadre financier pluriannuel concernant le financement de la coopération de l'UE en faveur des États d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique et des pays et territoires d'outre-mer pour la période 2014-2020 (onzième Fonds européen de développement)

2012/2222(INI)

Le Parlement européen a adopté par 547 voix pour, 61 voix contre et 26 abstentions, une résolution sur la préparation du cadre financier pluriannuel concernant le financement de la coopération de l'UE en faveur des États d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) et des pays et territoires d'outre-mer  (PTOM) pour la période 2014-2020 (11e Fonds européen de développement - FED).

Le Parlement rappelle la nécessité de doter le 11e FED d'une enveloppe suffisante, afin que l'Union respecte les engagements fixés au niveau international en matière de développement de consacrer 0,7% de son PIB à l'aide au développement. Il insiste tout particulièrement sur la nécessité d’allouer au moins 90% des fonds du 11e FED aux États ACP qui remplissent les critères de l'aide publique au développement (APD) tels qu'établis par le Comité d'aide au développement de l'OCDE. Pour atteindre cet objectif, il estime qu’il faut redoubler d’efforts pour les OMD les moins avancés, et allouer notamment une quote-part de 20% du 11e FED à la fourniture de services sociaux de base, en particulier dans les domaines de la santé et de l’éducation de base. Dans ce contexte, une attention particulière devrait être accordée au renforcement de l'accès aux soins en matière de santé maternelle, reproductive et infantile, en mettant l'accent sur les populations les plus pauvres et sur la lutte contre le VIH/SIDA. La priorité doit également aller aux catégories de personnes les plus vulnérables de la société, dont les femmes, les enfants et les personnes handicapées.

Promotion du développement économique et social des PTOM : le Parlement se réjouit que la proposition de décision d'association outre-mer (DAO) reconnaisse le besoin de mettre en place un nouveau partenariat durable avec les PTOM, axé sur quatre nouveaux objectifs:

  1. l'accroissement de la compétitivité des PTOM,
  2. le renforcement de leur capacité d'adaptation,
  3. la réduction de leur vulnérabilité,
  4. la promotion de leur coopération avec d'autres partenaires.

Il déplore toutefois l'absence d'un instrument financier spécifique aux PTOM qui serait intégré au budget de l'Union afin de permettre un contrôle démocratique et transparent des fonds ainsi alloués.

Budgétisation et enveloppe financière : une fois encore, le Parlement réclame la budgétisation du FED dès la prochaine période de programmation ou, à défaut, à partir de 2021, avec le transfert intégral à la rubrique 4 du CFP («L'Europe dans le monde»).

Parallèlement, il soutient la proposition de la Commission d'allouer un montant global de 30,319 milliards EUR (prix 2011) au 11e FED, et souhaite que les montants retenus pour les autres instruments de coopération, y compris l'instrument de coopération au développement (ICD), permettent de maintenir l'aide publique au développement de l'Union à son niveau actuel, voire de l'augmenter si possible.

Le Parlement met également en avant quelques grandes priorités de financement :

  • un fort investissement dans la réduction des risques de catastrophes ;
  • le maintien du programme intra-ACP à hauteur de l’enveloppe du 10e FED ;
  • la prise en compte du dispositif d’absorption des chocs externes à dimension internationale (crise financière, alimentaire ou humanitaire notamment) pouvant frapper les ACP ;
  • 5% au moins des ressources du FED aux dépenses d'appui de la Commission.

Réduction du budget du FED pour la période 2014-2020 : le Parlement déplore l'accord conclu par les États membres le 8 février 2013, qui prévoit une réduction de 11% de l'enveloppe pour le 11e FED proposée en juillet 2012 par la Commission et sans que le Parlement soit associé à cette décision. Il souligne la profonde contradiction qui existe entre les engagements répétés du Conseil d'atteindre d'ici 2015 les objectifs fixés en matière d'aide au développement, et les sérieuses réductions des budgets nationaux et de l'Union dévolus à la solidarité internationale. Il estime qu'en procédant à de telles coupes budgétaires, l'Union et ses États membres porteront une grande part de responsabilité si l'objectif de réduire de moitié la pauvreté dans le monde n'est pas atteint en 2015. Il insiste pour que, quels que soient les clés de répartition et les montants finaux retenus pour le 11e FED, la proportion réservée aux PTOM dans la répartition de l'enveloppe globale du FED soit identique à celle proposée par la Commission. D’une manière générale, il estime que les propositions financières pour la période 2014-2020, actuellement discutées au Conseil, sont préoccupantes pour l'avenir de la politique européenne de développement mais également pour l'association qui lie les PTOM à l'Union européenne.

Le Parlement souligne notamment l’importance d’avoir un budget de l’Union à la hauteur des défis à relever, spécialement en temps de crise, car il permet des financements qui ne pourraient être assumés sur le plan national, notamment en matière de financement du développement. C’est pourquoi, le Parlement appelle à la création de ressources propres, telles qu’une taxe sur les transactions financières pour que le budget de l’Union ne soit plus l’otage de la seule question du niveau des crédits de paiement.

Réforme de la politique européenne de développement et 11e FED : rappelant son point de vue selon lequel l'accord de Cotonou devait rester le principal cadre de référence pour le 11e FED, le Parlement estime que la mise en œuvre concrète du principe de différenciation dans l'accès aux fonds du 11e FED ne peut être positive que si ce principe est pondéré par un indice de vulnérabilité, qui complète le critère du PIB, qui compile un indice national de mesure de la pauvreté et de l'inégalité, et qui prenne en compte la situation particulière des petits États insulaires en développement. Pour le Parlement, seul le maintien d'un dialogue politique étroit conditionnera l'acceptation de ce principe par les ACP. Dans le cadre de ce dialogue politique, l'application du principe de différenciation peut se révéler indispensable pour faire progresser les pays ACP à revenus moyens et moyens supérieurs, vers l'établissement d'un "État-providence" et l'élaboration de politiques nationales de redistribution des richesses et doit également prendre en compte la situation particulière des États fragiles. Á cet égard, le Parlement demande que la zone du Sahel et la Corne de l'Afrique bénéficient d'une attention particulière dans le cadre de la programmation du 11e FED.

Développement et secteur privé : le Parlement insiste encore sur l’impact du secteur privé en matière de développement. Il reconnaît que les nouvelles modalités de financement, comme la combinaison de subventions et de prêts, comportent des avantages certains dans un contexte de raréfaction des ressources publiques. Il se félicite dès lors de la récente mise en place du “Result Measurement Framework” (REM), qui permet à la BEI de mesurer l’impact sur le développement de toutes ses opérations effectuées en dehors de l’Union. Il reconnaît également l’importance de soutenir le secteur privé, notamment les microentreprises et les PME dans les pays ACP, pour favoriser la création de richesses et la mise en place d’environnements favorables aux entreprises. Le Parlement insiste en outre sur l’impact de la société civile en matière de définition des projets.

D’autres initiatives sont saluées et promues comme l'initiative "Énergie durable pour tous" développée par les Nations unies, qui bénéficie d'un fort soutien de l'Union, à hauteur de 500 millions EUR sous le 10e FED (en demandant que 11e FED poursuive ces actions) ou la déclaration de Maputo qui n’est pas encore clairement mise en œuvre et dans le cadre de laquelle les pays ACP se sont engagés à consacrer au moins 10% de leurs budgets nationaux à l'agriculture et au développement rural.

Contrôle démocratique : le Parlement rappelle l’importance de respecter le principe de l’“appropriation démocratique”, tel que défini par le programme pour l’efficacité de l’aide et invite les États ACP à associer plus activement leurs parlements nationaux, pour que le versement des fonds prévus dans les documents de stratégie par pays soit soumis au contrôle parlementaire a posteriori. Il souligne que la transparence et la responsabilité sont essentielles pour l'affectation des crédits du FED et le suivi des projets financés, y compris les aides directes aux budgets nationaux.

Sur la question de l’appui budgétaire, le Parlement rappelle que ce mécanisme présente de très nombreux avantages, comme la responsabilisation, une évaluation plus précise des résultats, une plus grande cohérence des politiques menées, une meilleure prévisibilité et une utilisation maximale des moyens directement au profit des populations. Ce dernier doit notamment permettre d’accroître la bonne gestion des finances publiques des bénéficiaires. C’est pourquoi, le Parlement appelle à ce que cet outil conserve une place importante dans le 11e FED, tout en renforçant le dialogue sur les droits de l’homme mené entre la Commission et les États ACP.

Efficacité du développement : le Parlement réaffirme les mérites de la programmation conjointe de l'aide entre l'Union et ses États membres, qui permet d'accroître la visibilité, l'impact et l'efficacité de la politique européenne de développement, tout en évitant les doublons et les gaspillages. Il demande toutefois que l’on clarifie les règles contenues dans le cadre commun pour la programmation pluriannuelle et que l’on rende le processus plus transparent.

Il demande enfin à la Commission de contribuer à :

  • faire respecter les normes sociales et environnementales comme condition pour l'obtention de marchés publics financés par le 11e FED dans les pays ACP ;
  • la mise en place de dispositifs efficients et équitables de collecte d'impôt afin d'améliorer la perception des recettes fiscales et prévenir l'utilisation des paradis fiscaux;
  • la prise en compte de la situation des femmes qui sont déterminantes pour la sécurité alimentaire, en particulier en Afrique, et pour le règlement des conflits.