Prescriptions minimales de sécurité et de santé relatives à l'exposition des travailleurs aux risques dus aux agents physiques (champs électromagnétiques)

2011/0152(COD)

OBJECTIF : refondre et abroger la directive 2004/40/CE concernant les prescriptions minimales de sécurité et de santé relatives à l’exposition des travailleurs aux risques dus aux agents physiques (champs électromagnétiques).

ACTE LÉGISLATIF : Directive 2013/35/UE du Parlement européen et du Conseil concernant les prescriptions minimales de sécurité et de santé relatives à l’exposition des travailleurs aux risques dus aux agents physiques (champs électromagnétiques) (vingtième directive particulière au sens de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 89/391/CEE) et abrogeant la directive 2004/40/CE.

CONTENU : avec la présente directive, le Parlement européen et le Conseil modifie la directive 2004/40/CE en abrogeant et en remplaçant le texte de 2004 qui n’est jamais entrée en vigueur en raison de problèmes de mise en œuvre.

Les principaux objectifs de cette révision sont de nature essentiellement technique et portent sur :

  • la définition de valeurs limites d’exposition sur la base de nouvelles preuves scientifiques ;
  • la fixation de dérogations, en particulier dans le secteur médical afin d’autoriser, de façon strictement encadrée, l’exposition des travailleurs manipulant l’imagerie médicale par résonnance magnétique (IRM).

Champ d’application: la directive adoptée fixe des prescriptions minimales en matière de protection des travailleurs contre les risques pour leur santé et leur sécurité résultant ou susceptibles de résulter d’une exposition à des champs électromagnétiques au travail. Elle couvre l'ensemble des effets biophysiques connus, directs et indirects, produits par des champs électromagnétiques. Les valeurs limites d'exposition (VLE) fixées dans la directive ne couvrent que les liens scientifiquement bien établis entre les effets biophysiques directs à court terme et l'exposition aux champs électromagnétiques. Elle ne couvre pas les effets à long terme potentiels.

Toutefois, si des éléments scientifiques probants sur des risques potentiels deviennent disponibles, la Commission devra étudier la réponse politique appropriée à y apporter, notamment, en présentant une proposition législative pour traiter de ces effets. Par le biais du rapport visé à la directive, la Commission devra en tenir le Parlement européen et le Conseil informés.

Á noter également que la directive ne couvre pas les risques découlant d’un contact avec des conducteurs sous tension.

Définitions : la directive définit ce qu’il faut entendre par «champs électromagnétiques» (dont les fréquences vont jusqu’à 300 GHz) ainsi que ce qu’il faut entendre par effets «biophysiques directs» qui sont les effets sur l'organisme humain directement causés par sa présence dans un champ électromagnétique, comprenant notamment, des effets thermiques, des effets non-thermiques ou des courants induits.

Sont également définis les effets «indirects» ou effets causés par la présence d'un objet dans un champ électromagnétique et pouvant entraîner un risque pour la sécurité ou la santé, tels qu’une interférence avec des équipements et dispositifs médicaux électroniques, y compris des stimulateurs cardiaques et d’autres implants médicaux, ou pouvant par exemple provoquer des incendies…

La directive définit entre outre les notions de :

  • valeurs limites d’exposition (VLE) ou valeurs établies sur la base de considérations biophysiques et biologiques, notamment sur la base des effets directs aigus et à court terme scientifiquement bien établis, comme des effets thermiques et la stimulation électrique des tissus. Il peut s’agir de VLE au-dessus desquelles les travailleurs sont susceptibles de subir des effets nocifs pour la santé («VLE relatives aux effets sur la santé») et de VLE au-dessus desquelles les travailleurs sont susceptibles de présenter un trouble passager des perceptions sensorielles («VLE relatives aux effets sensoriels») ;
  • valeurs déclenchant l'action (VA) ou niveaux opérationnels fixés afin de simplifier le processus permettant de démontrer que les VLE applicables sont respectées ou, lorsqu'il y a lieu, afin de prendre les mesures de protection ou de prévention appropriées telles qu'établies dans la directive.  Á cet effet, des VA «basses» et des «VA hautes» impliquant des niveaux différenciés de protection ou de prévention sont prévues.

Á noter que toutes les valeurs prévues à la directive font l’objet d’annexes différenciées.

Les grandeurs physiques, les VLE et les VA énoncées dans la directive sont fondées sur les recommandations de la Commission internationale de protection contre les rayonnements non-ionisants (CIPRNI).

Obligations des employeurs : le principe général édicté par la directive est que l’employeur évalue tous les risques pour les travailleurs dus aux champs électromagnétiques sur le lieu de travail et, si nécessaire, mesure ou calcule les niveaux des champs électromagnétiques auxquels les travailleurs sont exposés.

Évaluation des risques et détermination de l'exposition : pour effectuer l’évaluation des risques d’exposition, l’employeur pourra se servir d’une série d’outils techniques définis à la directive, notamment :

  • des guides pratiques tels que définis à la directive : il s’agit de guides pratiques non-contraignants définis par la Commission et dont la mise à disposition débutera en 2016 ;
  • d'autres normes ou lignes directrices établies par les États membres, y compris des bases de données relatives aux expositions ;
  • de niveaux d'émission ou d'autres données pertinentes relatives à la sécurité fournis par le fabricant ou le distributeur, pour l'équipement concerné par l’exposition, conformément au droit de l'Union applicable.

S'il s'avère impossible d'établir de manière fiable, en fonction d'informations facilement accessibles, que les VLE sont respectées, l'évaluation de l'exposition devra être effectuée sur la base de mesures ou de calculs. En pareil cas, l’évaluation devra tenir aussi compte des incertitudes liées aux erreurs de calcul ou d’erreurs numériques.

L’évaluation pourra être rendue publique conformément au droit de l'Union et aux législations nationales applicables sur le traitement des données à caractère personnel des salariés. Toutefois, et à moins que la divulgation ne réponde à un intérêt public supérieur, les autorités publiques en possession d'une copie de l'évaluation pourront rejeter une demande d'accès à ce document ou à une demande visant à le rendre public, lorsqu'une divulgation est susceptible de compromettre la protection des intérêts commerciaux de l'employeur, y compris ceux liés à la propriété intellectuelle.

Portée de l’évaluation : l’évaluation devra être programmée et effectuée par des services ou personnes compétents à des intervalles appropriés. Elle devra notamment se concentrer sur : i) les VLE relatives aux effets sur la santé, ii) les VLE relatives aux effets sensoriels, iii) les VA tels que définis à la directive et aux annexes II et III de la directive; mais aussi (entre autres) :

  • la fréquence, le niveau, la durée et le type d’exposition, y compris la répartition dans l’organisme du travailleur et dans l’espace de travail;
  • tous les effets biophysiques directs;
  • toute incidence sur la santé et la sécurité des travailleurs à risque particulier, notamment les travailleurs portant des dispositifs médicaux implantés, comme les stimulateurs cardiaques, ou les pompes à insuline, ou encore les femmes enceintes;….

Mesures de réduction des risques en cas d’exposition : en cas de constatation d’exposition des travailleurs, l’employeur devra veiller à ce que celle-ci soit limitée aux VLE relatives aux effets sur la santé et aux VLE relatives aux effets sensoriels telles qu’établies aux annexes II et III de la directive. Si l'exposition dépasse les VLE, l'employeur devra prendre immédiatement des mesures de prévention telles que prévues à la directive dont notamment la mise en place d’un plan d’action qui inclut des mesures techniques et/ou organisationnelles pour les travailleurs, destiné à éviter tout risque pour les travailleurs à risques particuliers et tout risque lié aux effets indirects (ex. : délimitation des zones d’accès tels que signaux, étiquetage, marquage au sol, barrières).

L’information et la formation des travailleurs sont également prévues, de même que la consultation et la participation appropriée des travailleurs et/ou de leurs représentants.

D’autres mesures spécifiques de protection sont prévues comme la mise à la terre des ouvrages ou l’utilisation de chaussures isolantes, des mesures de traçabilité des actions entreprises et appliquées, des mesures de gestion des risques (notamment lorsque les travailleurs présentent des symptômes passagers liés à l’exposition allant du vertige à la nausée, notamment).

Des dispositions spécifiques sont en outre prévues si les VA pertinentes sont (ou ne sont pas) dépassées. Ces dispositions consistent en mesures de protection de la sécurité des travailleurs à moins que l'évaluation effectuée conformément à la directive ne démontre que les VLE pertinentes ne sont pas dépassées et que les risques pour la sécurité peuvent être écartés.

Une série de dispositions dérogatoires sont toutefois prévues, de sorte que dans certaines conditions strictement encadrées, les VA pour les champs électriques et magnétiques puissent être dépassées.

D’une manière générale, les employeurs sont toutefois appelés à faire en sorte que les risques dus aux champs électromagnétiques sur le lieu de travail soient éliminés ou réduits au minimum. Si ces valeurs sont dépassées, elles ne pourront l’être que de manière temporaire et en pareil cas, les employeurs devront prendre les mesures nécessaires pour que les VLE soient de nouveau respectées dès que possible.

Des mesures sont également prévues pour tenir compte de l’exposition des travailleurs en milieux ouverts.

Surveillance de la santé : afin de prévenir et de détecter le plus rapidement possible tout effet nocif sur la santé résultant de l'exposition à des champs électromagnétiques, une surveillance appropriée de la santé des travailleurs devra être assurée conformément à la directive 89/391/CEE. Des dossiers médicaux ainsi que la disponibilité de ceux-ci sont prévus conformément à la législation et/ou aux pratiques nationales. En tout état de cause, lorsqu'une exposition supérieure aux VLE est détectée, l'employeur devra veiller à ce que des examens médicaux ou une surveillance médicale appropriés soient fournis, conformément aux pratiques nationales. Ces examens devront être réalisés aux frais de l´employeur.

Dérogations : une série de dispositions dérogatoires sont prévues. L'exposition pourra ainsi dépasser les valeurs limites si elle est liée à l'installation, à l'essai, à l'utilisation, au développement et à l'entretien d'équipements d'imagerie par résonance magnétique (IRM) destinés aux soins aux patients dans le secteur de la santé et à condition que certaines conditions soient remplies.

De même, les États membres pourront autoriser la mise en œuvre d'un système de protection équivalent ou plus spécifique pour le personnel travaillant dans des installations militaires opérationnelles ou participant à des activités militaires, y compris des exercices militaires internationaux conjoints, pour autant que cela permette de prévenir les effets nocifs pour la santé et les risques pour la sécurité.

La directive précise en outre les «circonstances justifiées» dans lesquelles un régime dérogatoire pourra s’appliquer. Toutes les dérogations devront faire l’objet d’une information auprès de la Commission.

Sanctions : les États membres pourront prévoir des sanctions appropriées en cas de violation de la législation nationale adoptée conformément à la directive. Ces sanctions devront être effectives, proportionnées et dissuasives.

Annexes : l’ensemble des annexes ont été revues et de nouvelles annexes ont été introduites pour définir de manière technique les valeurs à ne pas dépasser en fonction du niveau de fréquence des champs électromagnétiques produits.

ACTES DÉLÉGUÉS : la Commission peut adopter des actes délégués afin de modifier les annexes d’un point de vue purement technique, dans le but:

  • de tenir compte de l’adoption de règlements et de directives en matière d’harmonisation et de normalisation techniques relatives à la conception, à la construction, à la fabrication ou à la réalisation d’équipements ou de lieux de travail;
  • de tenir compte du progrès technique, de l’évolution des normes ou des spécifications les plus pertinentes et des nouvelles connaissances scientifiques concernant les champs électromagnétiques;
  • d’ajuster les VA lorsqu’il y a de nouveaux éléments scientifiques probants, à condition que les employeurs continuent à être liés par les VLE existantes fixées aux annexes II et III.

Le pouvoir d’adopter des actes délégués est conféré à la Commission pour une période de 5 ans à compter du 29 juin 2013.

Un acte délégué n’entre en vigueur que si le Parlement européen ou le Conseil n’a pas exprimé d’objections dans un délai de 2 mois à compter de la notification de cet acte au Parlement européen et au Conseil ou si, avant l’expiration de ce délai, le Parlement européen et le Conseil ont tous deux informé la Commission de leur intention de ne pas exprimer d’objections.

À titre exceptionnel, pour des raisons d’urgence impérieuses, tels des risques imminents potentiels pour la santé et la sécurité des travailleurs résultant de l’exposition de ces derniers aux champs électromagnétiques, il sera possible d’appliquer la procédure d’urgence aux actes délégués adoptés par la Commission.

ENTRÉE EN VIGUEUR : la directive entre en vigueur le 29.06.2013. La directive 2004/40/CE est abrogée à compter de cette date.

TRANSPOSITION : la directive devra être transposée dans les États membres pour le 01.07.2016 au plus tard.