Développer une industrie européenne durable des métaux communs

2014/2211(INI)

La commission de l'industrie, de la recherche et de l'énergie a adopté un rapport d’initiative d’Edouard MARTIN (S&D, FR) sur le développement d'une industrie européenne durable des métaux de base.

Le rapport a souligné l'importance que revêt l'industrie des métaux de base pour toute une série de filières en aval, parmi lesquelles l'automobile, l'aéronautique, la production énergétique, la construction ou encore les emballages.

L'Europe, déjà très dépendante en termes de matières premières, ne peut se permettre de laisser se créer une nouvelle dépendance dans les métaux de base. Dans le domaine de la sidérurgie, l'Union est en déficit de capacité de production d'aciers plats du fait des fermetures massives de ces dernières années et d'un redémarrage de la demande. La demande dans les métaux non-ferreux comme l'aluminium et le cuivre est en croissance constante malgré la crise.

L'impératif de la lutte contre le changement climatique : les députés insistent sur le fait que la refonte du système d'échange de quotas d'émission (SEQE) actuel est l'une des mesures les plus urgentes afin de garantir la compétitivité de l'industrie des métaux. Ils demandent à la Commission, dans la révision du SEQE, de récompenser les acteurs de l'industrie énergivore les plus performants en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Les industries à forte intensité énergétique devraient poursuivre leurs efforts visant à optimaliser les mesures en matière de recyclage et à réduire les émissions de CO2 afin d'assurer la compétitivité future de l'industrie et de répondre aux objectifs contraignants de réduction fixés par l'Union européenne.

L'ajustement des émissions de carbone aux frontières une mesure temporaire et flexible à dimension internationale, conforme à l'OMC : les députés attendent avec intérêt la prochaine conférence sur le climat COP21, soulignant le fait qu'un accord international ambitieux sur la lutte contre le changement climatique, qui mettrait en place un régime environnemental mondial cohérent afin de réduire les émissions de carbone, serait la façon la plus constructive de faire face au problème des émissions dans le monde. Un tel accord devrait nécessairement inclure des engagements fiables de la part des plus gros pays émetteurs.

Le rapport indique que le dispositif d'ajustement des émissions de carbone aux frontières incorpore à la réglementation européenne un modèle de réduction des émissions qui englobe également une orientation territoriale centrée sur la consommation. Une telle approche aurait l'avantage de proposer une solution universelle permettant à chaque État de décider de façon souveraine du niveau d'ambition de sa politique climatique, selon une évaluation d'impact minutieuse des conséquences.

La Commission est invitée à : i) veiller, dans les futurs accords commerciaux, à améliorer de manière significative les chances d'exportation et les possibilités d'accès au marché pour les produits européens issus des métaux de base; ii) inclure l'interdiction des pratiques de distorsion sur les matières premières (double prix, restrictions à l'exportation) dans les accords de libre-échange régionaux, bilatéraux et multilatéraux.

La compensation des émissions indirectes : les députés regrettent que le système de compensation étatique des coûts indirects ait créé une nouvelle source de concurrence déloyale sur le marché unique de l'Union européenne entre les industries des secteurs à haute intensité énergétique, dont certaines bénéficient du soutien financier de leurs pouvoirs publics. Ils demandent que cette compensation soit harmonisée et, lorsque cela se justifie, accordée au niveau européen afin d'assurer des conditions de concurrence égales avec les concurrents du monde entier et entre producteurs européens, et de garantir une protection effective contre la fuite de carbone.

Soutien aux investissements dans la production de métaux à faible teneur en carbone : le rapport demande que les quotas gratuits pour les installations les plus efficaces dans les secteurs exposés à la fuite de carbone soient alloués en fonction des programmes d'investissements dans de nouveaux équipements, dans la recherche et développement (notamment la capture, le stockage et l'utilisation du carbone) et dans la formation des travailleurs, le plus tôt possible et en tout état de cause à partir de 2018, et pendant la quatrième phase pour couvrir la période 2021-2030. Il insiste sur la nécessité d'investir dans la R-D afin que l'Europe puisse rester un pôle d'excellence dans la production des métaux de base.

Les recettes tirées de la mise aux enchères dans le cadre du SEQE devraient servir à financer l'action pour le climat au sein de l'Union et dans les pays en développement, notamment des investissements dans les énergies renouvelables et dans des projets d'efficacité énergétique dans les secteurs industriels.

Le rapport souligne également l’importance :

  • d’accroître la transparence dans l'utilisation par les États membres des recettes tirées des allocations de quotas, de façon à aider les citoyens à comprendre comment les recettes du SEQE sont utilisées par les pouvoirs publics nationaux ;
  • d’améliorer la compétitivité du secteur européen des métaux de base grâce à la possibilité de conclure des contrats à long terme, compatibles avec un retour sur investissement, et dont la durée ne peut être inférieure à 15 ans dans le cas d'industries à forte intensité de capital; la préférence devrait être accordée à la stabilité des contrats de fourniture d'électricité à long terme plutôt qu'à la vente aux enchères annuelle d'électricité ;
  • d’organiser le transfert de compétences entre générations de travailleurs dans toutes les usines et de mettre en place de politiques industrielles et de l'emploi dynamiques afin de garantir le développement des connaissances et leur reconnaissance en tant qu'atout important de l'industrie européenne des métaux de base ;
  • de mettre en place une action diplomatique européenne sur les matières premières dans la production métallurgique, basée sur des partenariats stratégiques visant au partage de la valeur ajoutée entre les pays européens et les pays producteurs de matières premières ;
  • de conclure la révision des deux règlements relatifs aux instruments de défense commerciale afin de rationaliser, de renforcer et d'accélérer ces instruments et d'éviter ainsi qu'ils ne soient affaiblis ;
  • de faire en sorte que la Commission, lorsqu'elle définit les marchés géographiques pertinents dans ses analyses et ses comparaisons, prenne le marché mondial comme marché de référence et ne limite pas son analyse au seul marché intérieur;
  • d’encourager la mise en place d'une économie circulaire sur chaque site de production de métaux de base afin de conjuguer la valorisation des coproduits et des métaux recyclés dans l'objectif d'accroître leur compétitivité et de faire des progrès rapides dans le recyclage des terres rares et des métaux critiques consommés dans l'Union.

La Commission est invitée à i) élaborer des mesures d'incitation économique pour le recyclage des métaux, y compris des matières premières essentielles actuellement non rentables, comme les terres rares, ii) examiner les moyens d'aider les marchés des matières recyclées grâce notamment à des certificats verts, à des exigences en matière d'écoconception et à des mesures d'incitation fiscale, et iii) veiller à ce que la politique de cohésion et les budgets du Fonds européen pour les investissements stratégiques contribuent aussi à promouvoir l'efficacité des ressources et le recyclage.