Instrument international sur les marchés publics

2012/0060(COD)

OBJECTIF : établir des mesures visant à améliorer l’accès des opérateurs économiques, produits et services de l’Union aux marchés publics et marchés de concessions des pays tiers.

ACTE PROPOSÉ : Règlement du Parlement européen et du Conseil.

RÔLE DU PARLEMENT EUROPÉEN : le Parlement européen décide conformément à la procédure législative ordinaire sur un pied d’égalité avec le Conseil.

CONTEXTE : bien que les marchés publics de l’UE soient ouverts aux soumissionnaires étrangers, les marchés publics pour des produits ou services étrangers dans les pays tiers demeurent largement fermés en droit ou en fait. De nombreux pays tiers sont réticents à ouvrir leurs marchés publics à la concurrence internationale. La valeur des marchés publics ouverts aux soumissionnaires étrangers n’est ainsi que de 178 milliards EUR aux États-Unis et de 27 milliards EUR au Japon, et, en Chine, seule une fraction minime des marchés publics leur est accessible.

La Commission estime que globalement, plus de la moitié des marchés publics au niveau mondial est actuellement verrouillée par des mesures protectionnistes, et cette proportion ne cesse de croître. En conséquence, seulement 10 milliards EUR d’exportations en provenance de l’Union (représentant 0,08% de son PIB) trouvent actuellement un débouché sur les marchés publics au niveau mondial, alors que l’on estime à 12 milliards EUR les exportations qui ne se réalisent pas en raison des restrictions appliquées.

Les marchés publics de l’Union sont pour leur part ouverts, pour un montant de quelque 352 milliards EUR, aux soumissionnaires originaires des pays parties à l’accord de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les marchés publics (AMP). Toutefois, certains acteurs économiques d’importance comme la Chine, le Brésil ou l’Inde ne sont pas encore signataires de cet accord.

En mars 2012, la Commission a présenté sa première proposition d’instrument international sur les marchés publics en vue d’améliorer les conditions dans lesquelles les entreprises de l’UE participent à des marchés publics dans les pays tiers. Cette proposition initiale a été examinée au Parlement européen et au Conseil, toutefois sans conclusion de la première lecture.

Depuis le lancement de sa proposition de 2012, des négociations commerciales importantes ont été engagées avec les États-Unis (TTIP) et le Japon (ALE) ou poursuivies, comme avec la Chine (pour l’adhésion à l’AMP). La Commission estime que l’adoption de l’instrument international sur les marchés publics enverrait un signal fort à ces pays et aux autres partenaires, et encouragerait les négociateurs à accélérer et poursuivre l’ouverture substantielle de leurs marchés en la matière.

Étant donné qu’il semble y avoir un large consensus sur le fait que les entreprises européennes devraient bénéficier d’un meilleur accès aux perspectives de marchés publics à l’étranger, la Commission a décidé de revoir sa proposition initiale afin de répondre à certaines des préoccupations exprimées par les deux organes législatifs de l’Union, tout en garantissant que, grâce à la proposition révisée, l’Union dispose de moyens de pression plus appropriés dans ses négociations visant à ouvrir les marchés publics étrangers.

ANALYSE D’IMPACT : le comité d’analyses d’impact de la Commission a rendu deux avis sur le rapport d’analyse d’impact. Les modifications proposées à présent visent à cibler davantage l’instrument et à faciliter sa mise en œuvre tout en limitant les effets négatifs potentiels.

Sur le plan de l’efficacité,

  • la proposition modifiée continue de respecter l’objectif initial de clarification des règles applicables et la Commission continuera d’avoir le dernier mot concernant le recours aux mesures restrictives ;
  • avec la suppression du pilier décentralisé (qui permettait à l’entité adjudicatrice d’exclure une offre de manière autonome), l’application des règles sera plus simple et plus harmonisée et la marge d’erreur liée à la mise en œuvre des mesures restrictives par les pouvoirs adjudicateurs et entités adjudicatrices sera réduite ;
  • le raccourcissement des délais accordés à la Commission pour mener ses enquêtes permettra de savoir plus rapidement si des mesures restrictives doivent être prises. 

Sur le plan de l’efficience, les amendements proposés réduisent la charge administrative :

  • l’analyse d’impact a estimé les coûts liés au processus de notification de la procédure décentralisée à quelque 3,5 millions EUR. La suppression du pilier décentralisé, y compris ses délais, élimine tous les risques potentiels associés au processus de notification relevés par l’analyse d’impact ;
  • la possibilité de mesures plus ciblées sur les territoires d’un pays tiers qui sont véritablement responsables de l’application de mesures discriminatoires, sans frapper le pays tout entier, devrait réduire le risque de rétorsion.

CONTENU : la proposition révisée de la Commission visant à mettre en place un instrument international sur les marchés publics est la réponse apportée par l’Union pour pallier l’absence de conditions équitables en matière de passation de marchés au niveau mondial.

Les modifications incluses dans la proposition visent à accroître les effets de l’instrument sur les pays tiers, tout en éliminant toutes les conséquences négatives qu’il aurait pu avoir sous sa forme initiale, telles que la possibilité de fermer complètement les marchés publics de l’Union à un partenaire commercial, la charge administrative liée à l’application de l’instrument et le risque de fragmentation du marché intérieur.

En parallèle, la proposition met en évidence le rôle de la Commission dans le cadre des enquêtes sur les barrières existant dans les pays tiers et fournit les outils nécessaires pour dialoguer avec ces pays en vue de leur suppression.

Concrètement, la proposition :

  • supprime la possibilité de fermeture du marché tout en conservant la possibilité d’imposer des pénalités de prix - désormais appelées «mesures d’ajustement des prix», sous certaines conditions. Si la Commission établit, au terme de son enquête, qu’un pays applique des barrières entravant la participation européenne à des marchés publics, un ajustement des prix pourrait être appliqué aux soumissionnaires, aux produits ou aux services de ce pays. Les soumissionnaires étrangers faisant l’objet d’une mesure d’ajustement des prix pourraient néanmoins remporter le marché si, malgré cet ajustement, leur offre reste compétitive en termes de prix et de qualité ;
  • supprime le «pilier décentralisé», éliminant ainsi la possibilité, pour les pouvoirs adjudicateurs, de décider de manière autonome d’interdire la participation de soumissionnaires étrangers à leurs appels d’offres ;
  • établit la présomption que les offres émanant d’entreprises originaires du pays tiers ciblé seront soumises à la pénalité de prix, sauf si elles peuvent démontrer que la valeur totale de leur offre est constituée à moins de 50% de produits ou de services non couverts qui sont originaires de ce pays tiers. La charge de la preuve incomberait désormais au soumissionnaire;
  • réduit la charge administrative en autorisant les États membres à indiquer, parmi leurs entités adjudicatrices, celles qui seront chargées de mettre en œuvre la mesure d’ajustement des prix ;
  • prévoit que la mesure d’ajustement des prix ne serait applicable ni aux PME européennes ni aux soumissionnaires ou aux produits originaires de pays en développement bénéficiant d’un traitement SPG+ ;
  • introduit une nouvelle disposition qui permettrait de cibler des territoires au niveau régional ou local, par exemple des entités fédérées, des régions, voire des municipalités ;
  • raccourcit le délai accordé à la Commission pour ses enquêtes dans le cadre de la procédure centralisée ;
  • prévoit de rendre publiques les conclusions des enquêtes de la Commission établissant l’existence de barrières dans les pays tiers ;
  • clarifie que l’instrument s’appliquera à tous les marchés publics et concessions couverts par les directives de l’Union sur la passation de marchés publics et de concessions adoptées en février 2014 (qui excluent par exemple les concessions relatives aux services d’alimentation en eau).