AVIS DE LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE (BCE) sur a) une proposition de règlement établissant des règles communes en matière de titrisation ainsi quun cadre européen pour les opérations de titrisation simples, transparentes et standardisées et b) une proposition de règlement modifiant le règlement (UE) n° 575/2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises dinvestissement.
La BCE est favorable aux objectifs des règlements proposés, consistant à favoriser la poursuite de lintégration des marchés financiers de lUnion, à diversifier les sources de financement et à libérer des capitaux afin dassainir lactivité de prêt à léconomie réelle. Elle estime que les propositions parviennent à un juste équilibre entre la nécessité de relancer le marché européen de la titrisation, en rendant le cadre de la titrisation plus attrayant à la fois pour les émetteurs et les investisseurs, et la nécessité de conserver le caractère prudentiel du cadre réglementaire.
En ce qui concerne le règlement proposé en matière de titrisation, la BCE formule les recommandations suivantes :
Dispositions applicables à toutes les titrisations : la BCE se félicite que le règlement proposé regroupe et harmonise les exigences réglementaires existantes au sein dun ensemble commun de dispositions applicables à toutes les titrisations.
Afin déviter les incohérences et la duplication inutile des exigences de transparence et de publication prévues par le règlement proposé, la BCE recommande labrogation de larticle 8 ter du règlement (CE) n° 1060/2009 du Parlement européen et du Conseil sur les agences de notation de crédit mais aussi, après lexpiration de la période de transition prévue par le règlement proposé, celle du règlement délégué (UE) 2015/3 de la Commission, lié au règlement (CE) n° 1060/2009.
Tout en se déclarant favorable à lapproche du règlement proposé concernant les exigences de transparence, la BCE estime que ces exigences devraient être conciliées avec les obligations de confidentialité applicables aux opérations privées et bilatérales.
Les investisseurs potentiels devraient également se voir communiquer les prospectus ou les documents doffre équivalents, les données par prêt et les autres documents relatifs à la titrisation. Toutefois, ces données ne devraient être divulguées que sil sagit dopérations publiques ; dans le cas contraire, elles devraient uniquement être communiquées aux investisseurs potentiels auprès desquels une opération est commercialisée.
De plus, certaines titrisations, comme les opérations intragroupe ou les opérations ne faisant intervenir quun seul investisseur, devraient être dispensées de charges déclaratives inutiles.
La BCE recommande aussi que le règlement proposé exige expressément de communiquer les données par prêt en les rédigeant, si nécessaire, de manière à protéger la confidentialité des entreprises clientes des sponsors.
Critères pour les titrisations STS : la BCE est favorable à la mise en place de critères visant à déterminer un sous-ensemble de titrisations pouvant être considérées comme simples, transparentes et standardisées (STS).
- Des critères clairs : la BCE souligne limportance que ces critères, ainsi que leur application soient clairs et ne soient pas exagérément complexes pour ne pas empêcher les investisseurs de remplir leurs vastes obligations de diligence appropriée et pour que les initiateurs et les sponsors décident dappliquer le dispositif STS et de se soumettre au système des sanctions en cas dinapplication des critères.
La BCE estime que la plupart des critères sont suffisamment clairs mais que plusieurs dentre eux devraient être précisés. Par conséquent, elle recommande de charger lAutorité bancaire européenne (ABE) délaborer, en coopération avec lAutorité européenne des marchés financiers (AEMF) et lAutorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (AEAPP), des normes techniques de réglementation pour les critères STS lorsque ceux-ci ont besoin dêtre précisés.
- Actifs de bonne qualité : sil est possible dadmettre des prêts productifs restructurés plus de trois ans avant leur intégration dans une titrisation STS, la BCE estime que tout assouplissement au-delà de ce seuil nécessiterait un recalibrage des exigences de fonds propres prévues dans la proposition actuelle, afin de conserver le caractère prudentiel du dispositif STS.
- Programmes de papiers commerciaux adossés à des actifs (programmes «ABCP») : si de tels programmes sont susceptibles de soutenir le financement de léconomie réelle, la BCE estime toutefois que le traitement préférentiel en termes dexigences réglementaires de fonds propres devrait se limiter aux programmes ABCP sans asymétries déchéances entre les actifs sous-jacents et les passifs de papiers commerciaux. Du point de vue prudentiel, les asymétries déchéances font courir aux investisseurs, en cas de défaillance du sponsor, un risque de report et de pertes potentielles. La BCE recommande donc dappliquer un plafond déchéance résiduelle dun an, au lieu du plafond de trois ans, ou du plafond de six ans proposé par le texte de compromis du Conseil, pour les actifs sous-jacents de programmes ABCP de type STS, auquel la plupart des programmes ABCP existants pourraient se conformer ou dadapter.
- Normes de transparence : les titrisations STS devraient satisfaire à des normes de transparence plus rigoureuses que les titrisations non STS. En conséquence, le règlement proposé devrait préciser que les titrisations STS exigent dappliquer des normes plus strictes aux rapports destinés aux investisseurs.
Remboursement : la BCE estime que les titrisations dont le remboursement dépend de la liquidation des sûretés ne devraient pas être éligibles au dispositif STS. Seules les titrisations dont le remboursement dépend strictement de la volonté et de la capacité des débiteurs à respecter leurs obligations devraient être éligibles au dispositif STS.
Attestation STS, déclaration STS et diligence appropriée : la BCE est favorable à lapproche du règlement proposé, qui requiert à la fois que les parties à la titrisation attestent elles-mêmes, conjointement, quune titrisation remplit les critères STS, et que les investisseurs fassent eux-mêmes preuve de diligence appropriée pour vérifier la conformité avec ces critères.
La BCE estime toutefois quil ne convient pas daccorder expressément à des tiers, par la loi, un rôle dans le processus dattestation STS, étant donné que cela affaiblirait un pilier essentiel du dispositif STS. Au lieu de cela, la BCE considère que la sécurité juridique devrait principalement être garantie, pour les parties à la titrisation, en précisant suffisamment les critères STS.
Le processus de notification STS devrait garantir une meilleure clarté pour les investisseurs, en indiquant de manière explicite, dans le résumé du prospectus ou de la note dinformation équivalente, si les critères STS sont remplis et, dans laffirmative, de quelle manière.
Coopération efficace entre les autorités de surveillance : à cet égard, la BCE recommande :
Régime de sanctions : la BCE recommande la réduction des types de sanctions administratives disponibles en limitant la portée des amendes, la suppression de la possibilité, pour les États membres, dinfliger les sanctions pénales prévues en cas dinfraction au règlement proposé et limposition de sanctions uniquement en cas de négligence, y compris de négligence par omission, plutôt que lapplication stricte du principe de responsabilité.
Garantie dune surveillance stricte des titrisations STS de pays tiers : la BCE est favorable à un cadre de titrisation STS prêt à accepter des titrisations STS émises dans des pays tiers, à condition que cette acceptation saccompagne de lobligation, pour linitiateur, le sponsor et lentité de titrisation du pays tiers participant à cette titrisation, de se soumettre à un cadre solide de surveillance, pour leurs activités de titrisation STS, évalué par la Commission européenne comme équivalent au cadre de lUnion.
Compétences de surveillance prudentielle la BCE : la BCE a également évalué son rôle dautorité de surveillance prudentielle dans le nouveau régime de titrisation. Elle estime quil y a lieu de modifier le règlement proposé pour garantir que les compétences attribuées à la BCE reflètent les missions confiées à la BCE par le règlement (UE) n° 1024/2013 du Conseil.