Rapport annuel 2015 sur les droits de l'homme et la démocratie dans le monde et la politique de l'Union européenne en la matière

2016/2219(INI)

Le Parlement européen a adopté par 463 voix pour, 115 contre et 113 abstentions, une résolution sur le rapport annuel sur les droits de l'homme et la démocratie dans le monde 2015 et sur la politique de l'Union européenne en la matière.

Rôle central des droits de l'homme dans les politiques extérieures de l'Union : le Parlement s’est inquiété du fait que la promotion et la protection des droits de l'homme et des valeurs démocratiques étaient menacées partout dans le monde. Il a invité l’ensemble des institutions et des États membres de l’Union à concrétiser leurs engagements visant à promouvoir la démocratie et l’état de droit, à défendre et à mettre en œuvre les droits de l’homme et les libertés fondamentales, notamment le droit au développement par tous les moyens pacifiques, et à placer les droits de l’homme au cœur des relations entre l’Union et les différents pays tiers.

Préoccupés par le fait que de nombreux défenseurs des droits de l'homme sont aujourd’hui pris pour cible, les députés ont demandé à l'UE et à la vice-présidente en particulier d'adopter une politique visant à dénoncer systématiquement et sans équivoque les assassinats de défenseurs des droits humains et toute tentative de les soumettre à toute forme de violence ou de menace.

Le Parlement a également demandé la création d’un système de surveillance effective de l’espace accordé à la société civile, assorti de critères et d’indicateurs clairs. Il a réaffirmé l'importance de l'Instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme (IEDDH) qui apporte un soutien financier et matériel urgent et direct aux défenseurs des droits de l’homme en danger. Il a aussi rappelé l'importance du mandat du le Représentant spécial de l'UE pour ce qui est de renforcer l'efficacité de l'Union eu égard à la promotion des droits de l'homme et des principes démocratiques dans le monde.

En outre, les députés ont encouragé :

  • la création d’institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme, conformément aux principes de Paris des Nations unies, dotées d’un mandat suffisant ainsi que des ressources et des compétences appropriées pour assurer la préservation et le respect des droits de l’homme;
  • le développement des relations interparlementaires entre l'Union et ses partenaires.

Les députés se sont également félicités de l'adoption du cadre stratégique de l'UE et du nouveau plan d'action pour les droits de l'homme et la démocratie (2015-2019). Ils ont demandé que l’Union se dote des ressources et de l’expertise suffisante en affectant du personnel spécialisé aux délégations ainsi qu’à la Commission et au Service européen pour l’action extérieure (SEAE).

Nations-Unies : le Parlement a insisté pour que les dirigeants de l’Union soutiennent les réformes des Nations unies dans le but de renforcer l’impact et la force du système multilatéral fondé sur des règles et d’assurer une protection des droits de l’homme plus efficace ainsi que la progression du droit international. Il a encouragé l’Union à avoir plus souvent recours à des initiatives transrégionales, à proposer et à co-parrainer des résolutions ainsi qu’à suivre étroitement la procédure d’examen périodique universel de l’ONU.

La résolution a condamné le fait que des sièges du Conseil des droits de l’homme soient souvent occupés par des pays dont les antécédents de violations sévères des droits de l’homme sont prouvés, et a demandé aux États membres de l’Union de rendre publics leurs votes au CDH.

Le Parlement a formulé les recommandations suivantes :

  • les stratégies par pays devraient correspondre aux mesures de l’Union devant être mises en place dans chaque pays en fonction de situations particulières et contenir des indicateurs mesurables afin d’évaluer les progrès réalisés, ainsi que la possibilité d’ajuster ces indicateurs si nécessaire ; le Parlement européen devrait avoir accès à des informations concernant la manière dont ces stratégies sont mises en œuvre par l'Union ;
  • le SEAE devrait mettre en place un mécanisme de révision des dialogues sur les droits de l'homme en vue de les améliorer ainsi que des instruments alternatifs pour soutenir la promotion des droits de l'homme si les dialogues n'aboutissent pas à des résultats concluants ;
  • la Commission devrait mener une évaluation approfondie de la mise en œuvre des lignes directrices sur les droits de l'homme par les délégations de l'UE et les représentations diplomatiques des États membres dans tous les pays tiers ;
  • l'intégration militaire européenne devrait être renforcée afin d’améliorer la flexibilité et la réactivité des forces armées européennes, de leur permettre de faire face aux menaces et de réagir en cas de graves violations des droits de l’homme, de génocide ou de nettoyage ethnique :
  • la place du concept de «responsabilité de protéger» devrait être renforcée dans le droit international.

Migrations : le Parlement a demandé que des mesures soient prises pour améliorer la cohérence des politiques migratoires. Il a souligné la nécessité d’adopter une démarche globale pour trouver des solutions durables, cohérentes et à long terme qui reposent sur les normes et les principes internationaux des droits de l’homme, tout en s’attaquant aux causes profondes de la crise des réfugiés.

L’Union et les États membres devraient être pleinement transparents à l’égard de l’allocation des fonds destinés aux pays tiers pour la coopération sur les questions migratoires, et devraient communiquer les garanties mises en place pour s’assurer qu’une telle coopération ne bénéficie pas, directement ou indirectement, à des systèmes de sécurité, de police ou de justice impliqués dans des violations des droits de l’homme.

De plus, le Parlement a rappelé que des missions PSDC telles que Force navale de l’Union européenne - Méditerranée, opération SOPHIA (EUNAVFOR MED) constituaient un moyen de lutter concrètement contre le trafic des migrants, invitant l’Union à poursuivre et à intensifier ce type d’opérations.

Rôle des femmes : le Parlement a exprimé son soutien à la résolution 2242 adoptée par le Conseil de sécurité des Nations unies, qui reconnaît aux femmes un rôle central dans toute action visant à répondre aux enjeux d’envergure mondiale. Il a demandé à l’Union et à ses États membres de soutenir, dans la perspective d’une réconciliation durable, la participation systématique des femmes en tant qu’élément essentiel des processus de paix. Il a invité l’Union à appuyer, à l’échelon international, la reconnaissance de la valeur ajoutée de la participation des femmes à la prévention et à la résolution des conflits, ainsi qu’aux opérations de maintien de la paix, d’aide humanitaire et de reconstruction après conflit.

En outre, les députés ont souligné les points suivants :

  • l'UE devrait faire de la lutte contre la traite des êtres humains une priorité dans ses politiques extérieures ; tous les États membres devraient transposer la directive européenne 2011/36/UE et déployer la stratégie de l’Union en vue de l’éradication de la traite des êtres humains;
  • les droits de l'homme devraient être un élément transversal dans la réalisation de tous les objectifs de l'Agenda pour le développement durable de 2030 ;
  • l'UE devrait veiller à ce que les lignes directrices, les études d'impact et les mécanismes de rapport nécessaires fassent de la cohérence des politiques pour le développement une réalité dans les politiques de l'UE et dans celles de ses États membres ;
  • les échanges commerciaux et les droits de l’homme ne devraient pas s’exclure mutuellement et la mise en œuvre complète des principes directeurs des Nations Unies sur les entreprises et les droits de l'homme devrait être assurée ;
  • la Commission devrait veiller à ce que la mise en œuvre de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CRPD) soit systématiquement abordée dans le dialogue sur les droits de l'homme avec les pays tiers ;
  • les droits des femmes ne sauraient être compromis au nom du respect d’interdictions propres à une religion ou à des croyances et l'UE devrait intensifier son soutien à la mise en œuvre des obligations et engagements dans le domaine des droits des femmes;
  • l'UE devrait systématiquement consulter les organisations locales et internationales des droits de l'enfant et évoquer dans ses dialogues politiques en matière de droits de l'homme avec les pays tiers la question des obligations des États parties de mettre en œuvre la Convention des Nations unies sur les droits de l'enfant ;
  • l'UE devrait contribuer davantage à la réflexion sur la reconnaissance des mariages homosexuels ou des unions civiles entre personnes du même sexe en tant que question politique, sociale, humaine et de droits civils ;
  • l'UE devrait continuer à protéger les droits des populations autochtones et des personnes appartenant à des minorités, particulièrement touchées par les violations des droits de l'homme liées à l'extraction des ressources ;
  • l'UE devrait continuer à recourir à la coopération et à la diplomatie dans toutes les instances possibles à travers le monde pour plaider en faveur de l’abolition la peine de mort ;
  • la VP/HR devrait lancer une initiative visant à imposer un embargo européen sur les armes aux pays qui sont accusés de violation du droit international humanitaire, eu égard notamment aux attaques ciblant délibérément des infrastructures civiles.

Les députés se sont déclarés préoccupés par l'utilisation de drones armés en dehors du cadre juridique international, demandant aux États membres de formuler des positions politiques claires et réitérant leur appel à une position commune de l'UE sur l'utilisation des drones armés.

Enfin, le Parlement a réitéré son appel en faveur de l’introduction systématique de clauses relatives aux droits de l’homme dans tous les accords internationaux, y compris les accords commerciaux et d’investissement conclus et à conclure entre l’Union et les pays tiers. Il a plaidé pour des mécanismes de contrôle a priori, intervenant avant la conclusion de tout accord-cadre ainsi que pour des mécanismes de contrôle a posteriori permettant de sanctionner les conséquences concrètes de violations desdites clauses.