Conditions de travail et emploi précaire

2016/2221(INI)

Le Parlement européen a adopté par 504 voix pour, 111 voix contre et 59 abstentions, une résolution sur les conditions de travail et l’emploi précaire.

A noter qu’une proposition de résolution de remplacement, déposée par la groupe ENF, a été rejetée en plénière par 65 voix pour, 622 voix contre et 4 abstentions.

Le Parlement constate qu’au cours des 10 dernières années, l’emploi conventionnel est passé de 62% à 59%. Si cette tendance se poursuit, l’emploi conventionnel pourrait s’appliquer à une minorité de travailleurs à l’avenir.

Vers un travail décent – améliorer les conditions de travail et l’emploi précaire : le Parlement indique que l’emploi précaire peut être considéré comme un emploi qui ne respecte pas les normes et lois de l’Union, internationales ou nationales, et/ou qui n’offre pas les ressources suffisantes pour permettre de vivre décemment ou pour garantir une protection sociale adéquate.

Il constate que le risque de précarité dépend du type de contrat mais aussi des facteurs suivants:

  • peu ou pas de sécurité de l’emploi en raison de la nature non permanente du travail, comme dans des contrats de travail à temps partiel involontaire et souvent marginal et, dans certains États membres, des horaires de travail peu clairs et des tâches qui changent en fonction de l’emploi à la carte;
  • une protection rudimentaire contre le licenciement et absence de protection sociale suffisante en cas de licenciement;
  • rémunération insuffisante pour un niveau de vie décent;
  • aucun ou peu de droits à une protection sociale ou à des prestations;
  • aucune ou peu de protection contre toute forme de discrimination;
  • aucune perspective, ou des perspectives limitées, d’évolution sur le marché du travail ou en matière de carrière et de formation;
  • faiblesse du droit collectif et peu de droit à la représentation collective;
  • un environnement de travail qui ne respecte pas les normes minimales en matière de santé et de sécurité.

Il rappelle les grands objectifs définis par l’OIT en matière de travail décent. Ce dernier doit en particulier garantir:

  • un salaire minimal, garantissant également la liberté d’association;
  • les conventions collectives, conformément aux pratiques des États membres;
  • la participation des travailleurs à la vie de l’entreprise, conformément aux pratiques des États membres;
  • le respect des négociations collectives;
  • l’égalité de traitement des travailleurs sur le même lieu de travail;
  • la protection de la santé et de la sécurité au travail;
  • la protection de la sécurité sociale pour les travailleurs et pour leurs ayants droit;
  • les dispositions relatives aux temps de travail et de repos;
  • la protection contre le licenciement;
  • l’accès à l’éducation, à la formation et à l’apprentissage tout au long de la vie;
  • le soutien à l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée pour tous les travailleurs.

Il appelle la Commission et les États membres à s’inspirer de cette définition lorsqu’ils opèrent des modifications à leur droit du travail.

Parallèlement, le Parlement appelle les États membres à adopter des politiques économiques destinées à renforcer la création d’emplois et le droit du travail, conformément à l’Agenda de l’OIT sur le travail décent.

Le Parlement souligne que la nature de l’emploi est en train de changer en raison de la numérisation du travail mais aussi de son automatisation, créant du même coup, de nouvelles formes d’emplois. Il faut donc en tenir compte et prévoir de nouvelles formes de protection.

Le Parlement pointe en outre les piètres conditions de travail des travailleurs qui ont des contrats à très court terme, particulièrement exposés à la précarité et aux abus de la part de leurs employeurs.

La Commission et les États membres sont donc appelés à renforcer le dialogue social dans toutes les structures de travail ainsi que les inspections du travail dans les secteurs les plus exposés (notamment les secteurs qui emploient des migrants).

Propositions : de manière générale, le Parlement invite la Commission et les États membres à lutter contre les emplois non conventionnels, précaires et atypiques sur la base du programme pour un travail décent de l’OIT et de la charte sociale européenne.

Il demande, entre autres, à la Commission et aux États membres de :

  • renforcer la qualité des emplois non conventionnels en prévoyant des standards minimum de protection sociale, de niveau de salaire, d’évolution de carrière et de formation;
  • assurer un niveau de sécurité sociale suffisant pour les nouvelles formes d’emplois;
  • prendre en compte les nouvelles formes d’emplois issues de la numérisation ou de l’économie collaborative;
  • prévoir, y compris pour les auto-entrepreneurs, des formes de représentations collectives adéquates;
  • procéder à la révision ciblée de la directive sur le détachement des travailleurs et la directive sur les travailleurs intérimaires ;
  • adopter des politiques ciblées pour protéger les travailleurs de l’économie informelle;
  • protéger les travailleurs particulièrement vulnérables que sont les personnes handicapées, les migrants ou les femmes qui travaillent dans des conditions particulièrement précaires;
  • lutter contre toutes les formes de harcèlement dont sont victimes les femmes enceintes ou celles qui retournent sur leur lieu de travail après une maternité;
  • prévoir des conditions de travail décentes pour tous les jeunes travailleurs qui se trouvent en situation de premier emploi;
  • prévoir de nouvelles mesures pour améliorer la mobilité des travailleurs ;
  • assurer les droits des travailleurs saisonniers ;
  • lutter contre les emplois non déclarés, les faux indépendants et toutes les formes d’emploi illégales qui menacent les droits des travailleurs et les systèmes de sécurité sociale.

Enfin, le Parlement précise qu’en aucun cas, une demande accrue de flexibilité sur le marché du travail ne devrait induire une surreprésentation des femmes dans des emplois atypiques et aux conditions de travail précaires.