Couper les sources de revenus des djihadistes - cibler le financement du terrorisme. Recommandation au Conseil, à la Commission et au SEAE

2017/2203(INI)

Le Parlement européen a adopté par 533 voix pour, 24 contre et 43 abstentions, une recommandation au Conseil, à la Commission et à la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité sur: couper les sources de revenus des djihadistes - cibler le financement du terrorisme.

Les députés ont déclaré que l’un des éléments essentiels de la lutte contre le terrorisme  était l’assèchement de ses sources de financement, y compris celles qui proviennent des circuits dissimulés de fraude et d’évasion fiscale, du blanchiment de capitaux et des paradis fiscaux.  Dès lors que certains financements peuvent provenir des pays européens et être utilisés ailleurs par les organisations terroristes et que d’autres proviennent de pays tiers, une stratégie élargie de l’Union devrait lier les deux dimensions interne et externe de la sécurité.

Le trafic illicite de marchandises, d’armes à feu, de pétrole, de drogues, de cigarettes et d’objets culturels, entre autres marchandises, ainsi que la traite des êtres humains, l’esclavage, l’exploitation des enfants, le racket et l’extorsion de fonds sont devenus des sources de financement pour les groupes terroristes.

Nombre d’organisations internationales à but non lucratif, d’organisations caritatives, d’autres fondations, réseaux et de donateurs privés ayant ou prétendant avoir des objectifs sociaux ou culturels, ont fourni la base des capacités financières de l’EIIL/Daech, d’Al-Qaïda et d’autres organisations djihadistes. L’EIIL/Daech et Al-Qaïda sont aujourd’hui devenus autosuffisants financièrement.

L’envergure mondiale du terrorisme appelle une réaction mondiale impliquant la coordination entre les institutions financières, les autorités répressives et les organes judiciaires et l’échange d’informations sur les personnes physiques et morales ainsi que les activités suspectes, tout en veillant au respect des droits fondamentaux concernant la protection des données à caractère personnel.

Le Parlement européen a adressé au Conseil de l’UE, à la Commission et au Service européen pour l’action extérieure les recommandations suivantes:

  • élaborer des stratégies de prévention fondées sur le partage des bonnes pratiques et sur l’échange d’informations en instaurant une plate-forme européenne institutionnalisée de renseignement financier au sein des structures existantes (par exemple Europol) pour renforcer l’échange préventif d’informations sur les soutiens financiers des réseaux terroristes et permettre de créer une base de données commune contenant les informations relatives aux physiques et morales ainsi qu’aux opérations suspectes;
  • contribuer au financement de programmes qui favorisent l’échange de bonnes pratiques entre les services de renseignement, en particulier en ce qui concerne les enquêtes et les analyses des méthodes de recrutement et de transfert des financements des terroristes et des organisations terroristes;
  • identifier les États membres des Nations unies présentant des défaillances stratégiques en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ainsi qu’en collaborant avec ces pays;
  • améliorer la surveillance des organisations suspectes impliquées dans des activités, comme le trafic illicite, le commerce de contrebande, la contrefaçon et les pratiques frauduleuses, en constituant des équipes communes d’enquête avec Europol;
  • respecter les règles de la coopération policière et de la coopération judiciaire lors de l’échange d’informations relatives aux comptes bancaires, notamment dans le cadre de procédures pénales;
  • prendre les mesures législatives nécessaires pour que les banques surveillent rigoureusement les opérations relatives aux cartes de débit prépayées afin de s’assurer que celles-ci ne puissent être rechargées que par virement bancaire et depuis un compte dont le titulaire est identifiable;
  • instaurer des mesures de contrôle rigoureux des flux financiers et des paradis fiscaux;
  • constituer une liste des personnes et des entités dont les opérations sont opaques et présentent des indices significatifs d’activités financières suspectes lorsqu’il existe des preuves que les autorités compétentes n’ont pas réagi;
  • imposer davantage de sanctions ciblées et d’autres mesures restrictives à toutes les personnes et entités qui mettent des ressources économiques à la disposition de l’EIIL/Daech, d’Al-Qaïd ou d’autres groupes djihadistes;
  • instaurer un système de contrôle pour que les lieux de culte et d’enseignement, les institutions, les centres, les organisations caritatives ou les associations culturelles communiquent dans le détail de qui elles reçoivent des fonds et l’utilisation qu’elles font des fonds qu’elles reçoivent, en provenance de l’Union comme de pays tiers;
  • obliger les agents chargés des opérations à déclarer aux autorités compétentes toutes les opérations importantes réalisées dans le cadre des systèmes informels de transfert de fonds;
  • proposer une législation pour mieux contrôler les opérations financières électroniques et les entreprises émettrices de monnaie électronique, y compris leurs intermédiaires, et veiller à ce que l’échange de crypto-monnaie contre des espèces, ou vice-versa, ait obligatoirement lieu par le truchement d’un compte bancaire identifié;
  • exercer un suivi rigoureux concernant la réglementation et le contrôle du trafic d’or, de pierres précieuses et de métaux précieux ;
  • introduire un certificat de traçabilité pour les objets d’art et les antiquités qui entrent sur le marché de l’Union;
  • renforcer la coopération avec les pays où sont détenus les fonds provenant du trafic de drogues, de la traite des êtres humains et du trafic de marchandises commerciales, ainsi qu’avec les pays d’origine des cigarettes illicites, en vue de leur saisie;
  • mener des initiatives au sein d’enceintes internationales afin d’améliorer la transparence de l’actionnariat des sociétés.

Le Parlement a réaffirmé que la lutte contre l’EIIL/Daech et les autres groupes djihadistes et leur destruction, que ce soit sur le plan financier, militaire ou idéologique, doivent continuer de figurer au premier rang des priorités en matière de sécurité et de défense. Il a invité le Conseil et la Commission à établir un mécanisme de rapports de référence annuels au Parlement portant sur les mesures prises par les États membres et la Commission pour lutter contre le financement du terrorisme.