Directive « retour »

2018/0329(COD)

OBJECTIF: améliorer l’efficacité des procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier.

ACTE PROPOSÉ: Directive du Parlement européen et du Conseil.

RÔLE DU PARLEMENT EUROPÉEN: le Parlement européen décide conformément à la procédure législative ordinaire sur un pied d’égalité avec le Conseil.

CONTEXTE: le retour effectif des ressortissants de pays tiers qui n’ont pas le droit de séjourner dans l’Union constitue un volet essentiel de l’agenda européen en matière de migration. Au niveau de l’UE, la politique en matière de retour est régie par la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil (la «directive sur le retour»). Depuis l’entrée en vigueur de ladite directive en 2010, la pression migratoire s’exerçant sur les États membres et l’Union dans son ensemble s’est accrue.

Deux grands problèmes peuvent être mis en évidence :

  • les pratiques nationales mettant en œuvre le cadre de l’UE varient d’un État membre à l’autre et ne sont pas aussi efficaces qu’elles devraient l’être. Entre autres, l'absence de cohérence entre les définitions et interprétations du risque de fuite et du recours à la rétention aboutit à la fuite de migrants en situation irrégulière et à des mouvements secondaires. Le manque de coopération de la part des ressortissants de pays tiers peut également entraver les procédures de retour;
  • l’efficacité de la politique de l’UE en matière de retour dépend également de la coopération des pays d’origine. La mise en œuvre de plusieurs arrangements juridiquement non contraignants en matière de retour et de réadmission a commencé. Les États membres doivent maintenant exploiter pleinement ces arrangements pour accroître les retours dans les pays concernés.

En 2017, la Commission a adopté une recommandation demandant aux États membres de prendre toute une série de mesures afin de rendre les retours plus effectifs, notamment en tirant pleinement parti de la souplesse offerte par la directive sur le retour. Malgré ces efforts, l’effectivité des retours ne s’est guère améliorée. Au contraire, le taux de retour dans l’ensemble de l’UE est même tombé de 45,8 % en 2016 à 36,6 % seulement en 2017.

La présente proposition s’inscrit dans un ensemble de mesures proposées par la Commission dans le prolongement du Conseil européen du 28 juin 2018, qui a souligné la nécessité d’accélérer sensiblement le retour effectif des migrants en situation irrégulière et a salué l’intention de la Commission de présenter des propositions législatives en vue d’une politique européenne plus efficace et cohérente en matière de retour.

CONTENU: la proposition de refonte de la directive 2008/115/CE vise à remédier aux lacunes et obstacles principaux rencontrés par les États membres dans l’exécution des retours afin notamment de réduire la durée des procédures de retour, de mieux lier procédures d’asile et procédures retour et de recourir plus efficacement aux mesures destinées à prévenir la fuite. Les modifications ciblées ne portent pas atteinte aux garanties et aux droits conférés aux ressortissants de pays tiers et respectent leurs droits fondamentaux, en particulier le principe de non-refoulement.

Concrètement, la proposition de refonte:

  • établit une nouvelle procédure à la frontière pour le retour rapide des demandeurs d’une protection internationale déboutés à la suite d’une procédure d’asile à la frontière. Elle prévoit des règles spécifiques simplifiées applicables aux ressortissants de pays tiers qui ont été soumis à la procédure d’asile à la frontière: i) adoption d’une décision au moyen d’un formulaire simplifié; ii) en règle générale, pas d’octroi d’un délai de retour volontaire (sauf si le ressortissant de pays tiers est titulaire d’un document de voyage valide et coopère avec les autorités nationales); iii) délai de recours plus court et motif spécifique de rétention. Cette procédure de retour à la frontière ferait suite à la procédure d’asile à la frontière ;
  • dresse une liste commune, non exhaustive, de critères objectifs permettant d’établir l’existence d’un risque de fuite dans le cadre d’une appréciation globale des circonstances propres à chaque cas;
  • instaure une obligation explicite pour les ressortissants de pays tiers de coopérer avec les autorités nationales à tous les stades de la procédure de retour, en particulier lors de l’établissement et de la vérification de leur identité en vue d’obtenir un document de voyage valide et d’assurer la bonne exécution de la décision de retour;
  • souligne clairement la nécessité d’adopter une décision de retour immédiatement après qu’une décision de rejet du séjour régulier ou y mettant fin a été prise;
  • adapte les règles relatives à l’octroi d’un délai de départ volontaire, ce délai ne devant pas dépasser 30 jours. En revanche, la proposition supprime l’obligation d’accorder un minimum de 7 jours lors de la fixation du délai de départ volontaire, ce qui permet aux États membres d’arrêter un délai plus court;
  • introduit la possibilité pour les États membres d’imposer une interdiction d’entrée, sans qu’elle accompagne une décision de retour, à un ressortissant de pays tiers séjournant irrégulièrement sur le territoire d’un État membre et dont le séjour irrégulier a été découvert à l’occasion de vérifications aux frontières effectuées à la sortie du territoire de l’UE lorsque les circonstances propres au cas considéré le justifient et compte tenu du principe de proportionnalité;
  • prévoit l'obligation de disposer de systèmes nationaux de gestion des retours qui fournissent en temps utile des informations pertinentes pour la supervision et le suivi des cas individuels en ce qui concerne l’identité et la situation juridique des ressortissants de pays tiers. Ces systèmes nationaux devraient être reliés à un système central mis en place par l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes;
  • oblige les États membres à établir des programmes de retour volontaire qui peuvent également comporter une aide à la réintégration;
  • prévoit un délai spécifique (cinq jours) pour l’introduction d’un recours contre une décision de retour, lorsque cette dernière est la conséquence d’une décision de rejet d’une demande de protection internationale qui est devenue définitive. Si le risque de violation du principe de non-refoulement n’a pas déjà été évalué par une autorité judiciaire dans le cadre de la procédure d’asile, un effet suspensif automatique devrait être accordé au recours formé contre une décision de retour. Une décision de suspension temporaire devrait être prise rapidement, en règle générale, dans un délai de 48 heures;
  • fixe des règles claires en matière de rétention: bien que la durée maximale de rétention de 6 mois et la possibilité de prolonger la rétention dans certaines circonstances particulières ne soient pas modifiées, la proposition exige que la législation nationale prévoie une durée minimale initiale de rétention de 3 mois, afin de mieux refléter le temps nécessaire pour mener à bien les procédures de retour et de réadmission avec les pays tiers. De plus, les États membres pourraient désormais procéder également à la rétention de personnes faisant l'objet d'une décision de retour lorsqu'elles constituent une menace pour l'ordre public ou la sécurité nationale.