Le Parlement européen a adopté, par 553 voix pour, 7 contre et 38 abstentions, une résolution sur la situation des droits de lhomme au Guatemala.
La résolution a été déposée par les groupes PPE, S&D, ECR, ALDE, Verts/ale, GUE/NGL et EFDD.
Détérioration des droits de l'homme et de l'état de droit
Le Parlement s'est déclaré préoccupé par le nombre croissant d'assassinats et d'actes de violence et par le manque de sécurité pour tous les citoyens et, plus particulièrement, pour les femmes et les défenseurs des droits de l'homme, regrettant que le gouvernement guatémaltèque continue de violer l'État de droit et la séparation des pouvoirs, qui est un principe fondamental des démocraties libérales.
Selon un rapport de l'Unité pour la protection des défenseurs des droits humains au Guatemala (UDEFEGUA), le nombre total d'agressions contre les défenseurs des droits humains et les populations indigènes en 2018 était de 391, dont 147 cas de criminalisation et 26 assassinats, une augmentation de 136 % par rapport à 2017. En 2017, 93 attentats, dont quatre assassinats, ont été enregistrés. En outre, la violence à l'égard des femmes demeure un grave problème, comme en témoigne le fait que le nombre de décès violents de femmes a augmenté de 8 % pour atteindre 662 cas. Les députés souligné que le taux d'impunité pour les crimes commis au Guatemala s'élève à 97 %.
Le Parlement a appelé les autorités guatémaltèques à cesser tous les actes d'intimidation contre la société civile guatémaltèque, et les organisations de défense des droits de l'homme en particulier, à respecter l'ordre constitutionnel et à garantir les droits fondamentaux de tous les citoyens guatémaltèques. Il a exhorté l'exécutif guatémaltèque à garantir immédiatement l'indépendance du pouvoir judiciaire et à garantir la liberté de la presse et des médias. Les députés ont réitéré leur demande de protection des défenseurs des droits de l'homme, en particulier des femmes défenseurs des droits de l'homme, saluant et soutenant l'action entreprise à ce jour par les ambassades européennes et la délégation de l'UE au Guatemala.
Commission internationale contre l'impunité au Guatemala (CICIG)
Le Parlement sest dit préoccupé face à la situation actuelle de la CICIG au Guatemala et a demandé au gouvernement guatémaltèque de cesser toute attaque illégale contre la CICIG et son personnel national et international. Il a rappelé qu'en janvier 2019, le gouvernement avait unilatéralement annulé avec effet immédiat l'accord avec l'ONU sur la CICIG et demandé que la CICIG quitte le pays, après avoir interdit le retour au pays du directeur de la CICIG et annulé les visas de 11 employés de la CICIG qui enquêtaient sur des affaires de corruption à haut niveau.
Les députés ont demandé la réalisation, sous légide des Nations unies, dune étude indépendante reflétant lincidence finale des travaux de la CICIG sur le système judiciaire du Guatemala et sa contribution à la stabilité politique du pays.
Dans ce contexte, ils se sont félicités de la décision d'application de la Commission de septembre 2018 visant à soutenir la prorogation du mandat de la CICIG avec 5 millions d'euros supplémentaires provenant de l'instrument de coopération au développement (ICD) pour le programme d'action annuel 2018 du Guatemala, et ont invité la Commission à débloquer d'urgence les 5 millions d'euros convenus et à poursuivre avec la CICIG tous les programmes approuvés.
Loi de réconciliation nationale
Le Parlement est convaincu que l'amendement proposé à la loi de réconciliation nationale constitue une menace importante pour l'état de droit au Guatemala et compromettrait considérablement les progrès importants réalisés grâce aux travaux des tribunaux nationaux dans leur lutte contre l'impunité. Il a rappelé que cet amendement étendrait l'amnistie à tous les crimes commis par les forces de sécurité nationales et les personnes agissant au nom du gouvernement, y compris les crimes contre l'humanité, tels que la torture, les disparitions forcées et le génocide.
Les députés ont exhorté le Congrès guatémaltèque à ne pas adopter le projet de loi, partageant l'avis du Haut-Commissaire des Nations Unies selon lequel l'amnistie prévue dans le projet de loi pour les auteurs de violations des droits de l'homme, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre alimenterait encore plus de violence dans le pays.
Élections
Notant que des élections générales et présidentielles au Guatemala sont prévues pour les 16 juin et 11 août 2019, le Parlement a proposé d'envoyer une mission d'experts électoraux de l'UE. Il a demandé que les élections se déroulent de manière pacifique et transparente et que le Tribunal électoral suprême agisse en toute indépendance et sans ingérence des institutions ou acteurs étatiques.
Accord d'association avec l'UE
Enfin, le Parlement a rappelé au gouvernement guatémaltèque que l'accord d'association UE-Amérique centrale comporte une clause relative aux droits de l'homme comme élément essentiel et que l'adhésion puisse être suspendue en cas de violation. Il a invité l'Union européenne et ses États membres à recourir aux mécanismes prévus dans l'accord d'association et l'accord de dialogue politique et de coopération pour encourager le Guatemala à mettre en uvre un programme ambitieux en matière de droits de l'homme et à lutter contre l'impunité.