Echanges d'informations extraites du casier judiciaire entre les États membres. Décision-cadre

2005/0267(CNS)

OBJECTIF : prévoir les modalités des échanges d’informations extraites des casiers judiciaires entre les États membres et opérer la refonte de la décision du 21 novembre 2005 relative à l’échange d’informations extraites du casier judiciaire.

ACTE PROPOSÉ : Décision-cadre du Conseil.

CONTEXTE : actuellement, les informations relatives aux condamnations pénales circulent entre les États membres sur base des mécanismes prévus par la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale de 1959 bien que de manière peu homogène. Celle-ci a été intégrée dans le corpus législatif communautaire sous la forme de la décision 2005/876/JAI du Conseil du 21 novembre 2005, en en améliorant les principaux mécanismes et en accélérant notamment les délais de transmission des informations (voir CNS/2004/0238). Elle n'apporte toutefois qu'une réponse partielle aux dysfonctionnements apparus entre les États membres dans ce domaine et ne permet notamment pas de garantir la transmission d’une information correcte et exhaustive des données entre les États membres.

Lors du Conseil JAI du 14 avril 2005, les États membres se sont prononcés en faveur du renforcement du dispositif existant en réaffirmant le maintien du principe actuel de centralisation des informations relatives aux condamnations pénales pour les ressortissants des États membres (il ne s’agit donc pas de prévoir l’échange d’informations sur les ressortissants de pays tiers condamnés sur le territoire de l’UE - pour ces derniers, les États membres ont préconisé la création d’un index des personnes condamnées, limité aux éléments permettant de les identifier, afin de déterminer dans quel État membre ils ont fait l’objet de condamnations). La présente proposition entend donc prendre en compte les options suggérées par le Conseil JAI d’avril 2005, tout en reprenant et en refondant les principaux éléments de la décision du 21 novembre 2005.

CONTENU: la présente proposition vise à garantir que l'État membre de nationalité de personnes condamnées soit en mesure de fournir une réponse correcte et exhaustive aux demandes d'antécédents judiciaires qui lui sont adressées par un ou plusieurs États membres concernant ses ressortissants.

Elle établit également le cadre qui permettra de construire et de développer un système informatisé d'échanges d'informations sur les condamnations pénales, basé sur l'utilisation d'un "format européen standardisé" permettant d'échanger ces informations sous une forme homogène, informatisée et aisément traduisible par des mécanismes automatisés. Ses principales dispositions peuvent se résumer comme suit :

Champ d’application et définitions : la définition de la "condamnation" intègre le champ d'application habituel de l'entraide judiciaire et comprend les décisions de nature mixte, administrative et pénale, qui existent dans certains États membres, notamment afin d'inclure certaines infractions routières pour lesquelles la connaissance des antécédents est particulièrement utile. Elle se veut toutefois restrictive afin de ne retenir que les condamnations au sens strict, retenues au sens des tribunaux pénaux des États membres. Le "casier judiciaire" devra être compris comme le registre national regroupant ces condamnations (certains États membres pouvant avoir plusieurs registres).

Obligations des États membres : l'objectif étant d'améliorer à l’échelle de l’UE la qualité des échanges d'informations sur les condamnations pénales, actuellement régis par la Convention de 1959, tous les États membres doivent respecter une série d'obligations, destinées à assurer que l'État membre de nationalité puisse apporter une réponse exhaustive aux demandes d'antécédents judiciaires qui lui sont adressées. Dans ce contexte, il incomberait à tous les États membres de désigner sur leur territoire respectif une (ou plusieurs) autorité(s) centrale(s) destinées à échanger les informations sur les casiers judiciaires. Ce sont via ces autorités que transiteront toutes les demandes d’extraits de casiers judiciaires à échanger, via un formulaire type défini à l’annexe de la proposition.

Obligations spécifiques incombant à l’État membre de condamnation : pour permettre la circulation d’informations correctes et exhaustives sur les casiers judiciaires, il est prévu que l’État de condamnation :

  • s’assure que les décisions de condamnation transmises au casier judiciaire national soient accompagnées de la mention de la nationalité de la personne condamnée lorsqu'il s'agit d'un ressortissant d'un État membre. La proposition laisse cependant aux États membres le soin de décider à quel stade de la procédure et sous quelle forme cette information devra être recueillie ;
  • prévoir le principe d’une obligation de transmission de l’extrait de casier judiciaire à l'État membre de nationalité d’une personne condamnée (y compris auprès de plusieurs États membres, si la personne condamnée a plusieurs nationalités) ;
  • prévoir l’obligation de conservation des informations transmises à l'État membre de nationalité, selon la forme et les modalités de conservation prévues ou à prévoir par chaque État membre.

Obligations spécifiques incombant à l'État membre de nationalité : dans la droite ligne de ce qui est déjà prévu dans la décision du 21 novembre 2005, les États membres auraient l’obligation de conserver et de mettre à jour les informations transmises (afin de les retransmettre éventuellement, une fois corrigées). Les modifications et suppressions intervenues dans l'État membre de condamnation devront être reflétées dans l'État membre de nationalité et celui-ci sera tenu de n'utiliser que des informations mises à jour. Ces règles ne peuvent cependant aboutir à traiter la personne de façon plus défavorable que si elle avait fait l'objet d'une condamnation prononcée par une juridiction nationale (ainsi, si les règles nationales d’inscription au casier judiciaire conduisent à la suppression de la mention de la condamnation, l'État membre de nationalité ne pourra plus utiliser ces informations dans le cadre d'une procédure nationale mais pourra toujours transmettre ces informations à un autre État membre, sur demande).

Réponse à une demande d'informations sur les condamnations : conformément à ce qui est déjà prévu par la décision du 21 novembre 2005, une réponse devra être transmise à l’État requérant immédiatement ou à tout le moins dans un délai de 10 jours, via le formulaire prévu à cet effet à l’annexe de la proposition. Les données échangées par les autorités centrales devront se limiter à :

  • des informations portant sur des condamnations nationales,
  • des condamnations prononcées par d’autres États membres, transmises avant ou après (selon une procédure différenciée) la mise en œuvre de la présente décision-cadre,
  • des condamnations prononcées par des pays tiers et qui lui ont été transmises.

Toutefois, l’échange des données devra se faire dans le strict respect du cadre instauré par la décision-cadre en matière de protection des données à caractère personnel.

Données à caractère personnel: la proposition reprend l’essentiel des dispositions de la décision du 21 novembre 2005 en la matière, tout en assouplissant certaines dispositions (il est notamment prévu de permettre une réutilisation limitée des informations transmises aux fins de prévenir un danger immédiat et sérieux pour la sécurité publique). Elle contient une série de dispositions destinées à garantir un degré élevé et adéquat de protection des données à caractère personnel transmises par l'État membre de condamnation à l'État membre de nationalité en intégrant et en complétant les dispositions de la décision du 21 novembre 2005 :

  • limites à l'utilisation par l'État membre requérant des informations qui lui ont été transmises sur demande,
  • fixation de règles spécifiques pour la retransmission éventuelle par l'État membre de nationalité d'informations qui lui auraient été transmises d'initiative par l'État membre de condamnation (avec une distinction entre les demandes adressées dans le cadre d'une procédure pénale et les autres).

Si la demande est faite à d'autres fins qu'une procédure pénale, seul l'État membre de condamnation sera en mesure de déterminer si (en fonction de la finalité de la demande) les informations relatives aux condamnations pénales peuvent être transmises dans leur intégralité. L'État membre de nationalité devra donc vérifier auprès de ce dernier si et, le cas échéant, dans quelle mesure il peut transmettre ces informations à l’État membre requérant. Les mêmes principes s’appliquent lorsque la demande émane d’un pays tiers afin d’éviter que l’État membre de nationalité ne lui transmette plus d’informations qu’à un autre État membre.

Format et comitologie : l'amélioration de la compréhension mutuelle passe par la création d'un "format européen standardisé" permettant d'échanger les informations sous une forme homogène, informatisée (et électronique), aisément traduisible par des mécanismes automatisés. La présente décision-cadre prévoit donc la création d'un comité qui assistera la Commission dans la définition et le développement de ce mécanisme d'échanges.

Relations avec d'autres instruments juridiques : la proposition complète l'article 13 de la Convention de 1959. Elle ne se substitue pas à la possibilité dont disposent les autorités judiciaires de se transmettre directement les informations relatives au casier judiciaire (conformément à l’art. 6, par.1, de la Convention relative à l’entraide judiciaire en matière pénale entre les États membres de l’UE du 29 mai 2000). Par contre, la proposition remplace l'article 22 de la Convention de 1959 dans les relations entre les États membres et abroge la décision du 21 novembre 2005.

IMPLICATIONS FINANCIÉRES :

Commentaire : l’unique incidence budgétaire de la proposition est celle qui résultera du fonctionnement de la procédure de comitologie qu’elle institue. Les décisions qui seront adoptées conformément à cette procédure et qui pourraient avoir des incidences budgétaires seront couvertes par le Programme-cadre « Droits fondamentaux et Justice » (voir COD/2005/0037).

Cadre EBA (gestion/établissement du budget par activités) : Chapitre 18 06 – Création d’un espace de liberté, de sécurité et de justice en matière pénale et civile.

Lignes budgétaires : lignes opérationnelles et lignes connexes d’assistance technique et administrative

Période d’application : indéterminé (dès l’entrée en vigueur du dispositif prévu)

Total indicatif du coût de l’action: uniquement dépenses administratives non incluses dans le montant de référence (ressources humaines) : 1,2 mios EUR pour une période indicative de 6 ans (début de l’action année « n », jusque « n+6 »), soit : 200.000 EUR/an.